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Les lieux de spiritualité et de recueil sont nombreux au Japon. Sanctuaires minuscules au détour des rues ou somptueux temples classés au patrimoine mondial de l’UNESCO, vous en avez certainement vu des dizaines en voyageant sur l’archipel. Si la visite de ces monuments vous fascine et que vous préparez un séjour dans la région de Setouchi, il est un lieu de culte unique en son genre qui devrait trouver sa place dans votre itinéraire : le temple Kosanji (耕三寺). Voici un aperçu de ce mausolée grandiose et étonnant.

Promenade dans Ikuchijima, petite île pittoresque de Setouchi

Mais avant d’entrer dans le vif du sujet et de pénétrer dans l’enceinte de ce temple si particulier, vous serez amenés à déambuler dans les ruelles de la petite île qui l’accueille : Ikuchijima (生口島). Si l’on semble ici coupé du reste du monde, nous sommes pourtant toujours dans la préfecture de Hiroshima (広島県). Reliée administrativement à la ville d’Onomichi (尾道市), elle est aussi physiquement attachée à elle via la Shimanami Kaido (しまなみ海道), cette voie cyclable traversant la mer intérieure de Seto jusqu’à Shikoku à travers plusieurs petites îles de la région.

Que vous arriviez à vélo ou en bateau, il vous faudra traverser une partie de l’île pour rejoindre le site du temple Kosanji. J’arrivais pour ma part sur place par une matinée ensoleillée de février, à bord d’un petit bateau en provenance de Mihara (三原). Je ne sais si c’est l’ambiance paisible, les étals d’agrumes colorés (spécialité de la région), la lumière légère du soleil d’hiver ou tout ça à la fois, mais je succombais immédiatement au charme d’Ikuchijima.

Si vous le pouvez, prévoyez un peu de temps dans votre itinéraire afin de vous perdre dans ces ruelles tranquilles avant de poursuivre vos visites. C’est une très belle manière de s’imprégner d’une facette plus authentique et souvent moins médiatisée du Japon.

Sans doute l’aurez-vous lu dans vos guides voyages ou l’aurez vous déjà découvert par vous-même, le Japon est véritablement un pays de contrastes. Et la petite île d’Ikuchijima en est un très bon exemple. D’un côté la vie insulaire paisible, douce, sans artifice. De l’autre, le grandiose, l’éclatant, l’époustouflant. Préparez-vous, le contraste entre cette atmosphère de village et l’extravagance du temple Kosanji est saisissant !

Le temple Kosanji, l’hommage incroyable d’un fils à sa mère

Il faut dire que l’histoire du temple Kosanji n’a rien de banal. Cet immense ensemble de monuments est le fruit de l’imagination d’un riche industriel, Kanemoto Kosanji devenu plus tard Kozo Kosanji. Lorsque sa mère quitta ce monde en 1934, il décida de dédier son temps et sa fortune à la construction d’un temple pour lui rendre hommage. Sa gratitude le poussa même à délaisser sa vie professionnelle pour devenir moine bouddhiste. Rien que ça !

Dès 1936 et sur plus de trente ans, il érigea le plus impressionnant des mausolées en se basant sur les temples préférés de sa mère. Si tous les bâtiments du Kosanji sont uniques, l’architecture de certains d’entre eux s’inspire ainsi de monuments emblématiques du Japon tels que la porte du sanctuaire Toshogu à Nikko ou le Palais Impérial de Kyoto. Galeries d’art, pagode à plusieurs étages, statue, hall principal… au total près de vingts bâtiments ont été édifiés dans l’enceinte du Kosanji, et quinze d’entre eux ont été désignés comme Biens culturels matériels au Japon. La reconnaissance indéniable d’un immense hommage.

Découverte du style Kosanji, démesuré et vibrant

Et si tout est matière à émerveillement et contemplation au temple Kosanji, cela est sans doute dû, entre autres choses, à l’ingénieux aménagement du terrain. Le complexe est en effet installé sur plusieurs niveaux, les monuments se dévoilant au regard des visiteurs un à un, suivant un parcours réservant bien des surprises. Difficile de s’imaginer face à la seule entrée du temple que des bâtiments bien plus impressionnant encore nous attendent plus loin. Celle-ci donne le ton pour le reste de la visite : le style kosanji est aussi démesuré que vibrant. Et pourtant, il ne s’agit là que d’une mise en bouche !

Une fois cette somptueuse porte passée et mon billet acheté, je commençais la visite en découvrant les œuvres d’art bouddhistes exposées au premier niveau du temple, dans de longues galeries ouvertes sur l’extérieur. C’est également à ce niveau que l’on peut visiter la villa Choseikaku (長生閣), construite en 1927 par Kosanji comme résidence pour sa mère, malheureusement fermée au public au moment de ma venue.

La visite se poursuit au deuxième niveau, à l’ombre d’une pagode de cinq étages entourée de deux pavillons. Mon premier ressenti face à l’entrée du temple se confirme, on se sent ici minuscule face à la grandeur et la démesure.

Pagode à cinq étages du temple Kosanji
Pagode à cinq étages du temple Kosanji

Les images ne sauraient d’ailleurs rendre justice aux proportions des bâtiments… Ni même aux couleurs éclatantes, bien plus vives que ce que l’on peut voir dans des temples plus traditionnels.

Encore quelques marches et vous voilà sous l’imposante porte Koyomon, incrustée de mille et un détails.

L'immense porte Koyomon, placée juste avant le hall principal du temple Kosanji

Puis, juste derrière, le hall principal, majestueux. Ici, la végétation est luxuriante et les couleurs toujours aussi vibrantes.

Le lieu est plein de vie, de calme et de beauté, sans doute la plus belle preuve de l’amour d’un fils pour sa mère. Une figure maternelle n’est d’ailleurs pas très loin avec une immense statue de Kannon surplombant le temple et veillant sur les visiteurs.

Des enfers bouddhistes au jardin de marbre, les trésors cachés de Kosanji

On pourrait croire à ce niveau du temple que la visite se termine, mais comme je l’évoquais plus haut, tout ne se dévoile pas à la vue des visiteurs instantanément. Si vous vous dirigez sur la droite du hall principal, vous découvrirez une entrée vous guidant dans un passage souterrain un peu particulier. Vous délaisserez ici l’éclat de la surface pour vous engouffrer dans une partie plus sombre du temple. Dans cette grotte labyrinthique et fortement symbolique, un aperçu des enfers bouddhistes est offert à ceux qui s’aventurent jusqu’ici.

Un passage de la visite peu rassurant mais fascinant, cette galerie sombre étant garnie de milliers de sculptures de Bouddhas.

Après cette descente aux enfers, place à la lumière pour clôturer la visite en beauté avec ce qui fut sans doute ma création architecturale préférée au sein de Kosanji : son jardin de marbre immaculé.

Lui aussi est bien caché et il faudra grimper encore quelques marches afin de le découvrir. Cette œuvre, la Colline de l’espoir (ou Miraishin No Oka), imaginée par l’artiste Itto Kuetani, n’a pas la fonction religieuse des autres monuments du temple, mais elle est incontournable.

La création entièrement faite de marbre importé d’Italie (3000 tonnes au total !) s’étale sur 5000 m2 et aura nécessité plus de quinze années de travail. Et le résultat est irréel. Le temps étant clair lors de ma visite, j’ai eu la chance de voir se découper les formes géométriques des sculptures sur un parfait fond bleu.

Difficile pour moi de me résoudre à quitter ce décor hypnotisant et je profitais du restaurant intégré à l’œuvre – lui aussi en marbre – pour prendre un verre sur place.

D’ordinaire plutôt attirée par les petits temples et sanctuaires sobres et discret, je ne savais trop à quoi m’attendre en allant visiter le temple Kosanji. Guidée par ma curiosité, je ne pouvais en fin de compte que m’émerveiller face à ce lieu unique à Setouchi et même au Japon tout entier. Un lieu où l’on perd la notion du temps et des repères mais où l’on prend la mesure de ce que l’amour et la gratitude pour une mère peut pousser à accomplir.

Informations pratiques

Cette région de Setouchi, près d’Onomichi et des îles voisines, est facilement accessible en train depuis les principales grandes villes du Japon. Il faut compter environ 4h depuis Tokyo, 2h depuis Kyoto, un peu moins d’une heure depuis Hiroshima.

L’île d’Ikuchijima, où se situe le temple, et son port de Setoda sont accessibles en bateau depuis le port d’Onomichi (40 min) ou depuis celui de Mihara (25 min). L’île étant également placée sur le trajet de la Shimanami Kaido, il est facile de la rejoindre en voiture ou à vélo, que ce soit depuis Onomichi ou depuis Shikoku.

  • Horaires d’ouverture : Le temple est ouvert tous les jours de 9:00 à 17:00. La villa Choseikaku est quant à elle ouverte de 10:00 à 16:00.
  • Tarif : 1400 yens pour les adultes, 1200 yens pour les plus de 65 ans, 1000 yens pour les étudiants, 800 yens pour les lycéens. Des tarifs préférentiels pour les groupes sont également disponibles et l’entrée est gratuite pour les enfants.

    Notez que le temple est accessible aux personnes à mobilité réduite malgré son aménagement sur plusieurs niveaux.

Pour plus d’informations, rendez-vous sur le site web officiel du temple.

Marion Pont

Marion Pont

Si mes racines sont françaises, mon esprit est plutôt enclin à l'évasion. Aux fourneaux ou les mains dans le terreau, absorbée par un livre ou une posture de yoga ; c'est d'être en plein coeur d'un voyage, mon appareil photo autour du cou, que j'aime par dessus tout. Après avoir goûté aux délices du voyage et à l'excitation d'une première expatriation (Pays-Bas), j'embarquais ainsi en Mars 2018 pour une année au Japon. Des recoins méconnus de Tokyo — où je posais mes valises — aux majestueuses dunes de sable de Tottori, en passant par la mystérieuse vallée d'Iya et l'envoûtante île de Sado, je partage ici mes plus belles découvertes de cette année inoubliable.

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