La péninsule de Kunisaki (préfecture d’Oita sur l’île de Kyushu), et particulièrement la région de Rokugo Manzan qui rayonne depuis le Mont Futago, est connue comme l’un des berceaux du syncrétisme entre l’ancien culte des montagnes, le shinto et le bouddhisme. Cela donne un identité particulière aux 31 temples et sanctuaires qui s’y trouvent, et une épaisseur spirituelle à l’atmosphère des montagnes de Kunisaki, peuplées de très nombreuses statues de pierre, dont certaines vieilles de 1300 ans.
Kunisaki : syncrétisme des cultes shinto et bouddhistes
Bien que l’histoire religieuse du Japon soit complexe — et que je sois loin d’en maîtriser toutes les subtilités —, je vais tenter de décrire simplement ce qui fait la spécificité de la spiritualité de Rokugo Manzan.
Le culte de la montagne semble aussi vieux que le Japon lui-même. La montagne étant omniprésente dans le paysage nippon, cela n’a rien d’étonnant. Cette sacralisation, voire cette déification, des montagnes est connue sous le nom de Sangaku Shinko. Dans les croyances shinto (le culte vernaculaire japonais), les montagnes abritent généralement des kami (divinités), et sont donc des lieux sacrés.
Au VIe siècle, le bouddhisme, venu du continent, est introduit au Japon. Plutôt que d’entrer en concurrence avec les cultes et croyances locales, il cohabite avec elles. Le shinto intègre des éléments bouddhistes et le bouddhisme se nourrit des croyances et cultes shinto, c’est ce que l’on appelle le Shinbutsu Shugo.
C’est ce syncrétisme qui prédomine au Japon jusqu’à l’instauration du shinto comme religion d’état à l’ère Meiji (1868-1912). Bien qu’aujourd’hui les lieux de culte shinto et bouddhistes soient le plus souvent clairement séparés et reconnaissables, des éléments rappelant ce syncrétisme subsistent dans les temples et sanctuaires, ainsi que dans les pratiques.
Ascèse et exercices méditatifs dans les montagnes de la péninsule de Kunisaki
Avec le culte shinto, la montagne était un objet de vénération. Le bouddhisme fait d’elle le lieu de la pratique religieuse. Les fameux Yamabushi (littéralement « ceux qui couchent dans la montagne », des moines-ascètes) et les autres adeptes du Shugendo (修験道) — pratique religieuse née de ce syncrétisme entre shinto et bouddhisme — ont la montagne pour terrain d’entraînement et de développement spirituel. Ils y pratiquent la retraite ascétique, le jeûne, la méditation, la marche et des exercices d’endurance comme se tenir debout sous une cascade glacée ou assis dans la neige en récitant les sutras.
Visite du temple Futago-ji
Le Futago-ji (両子寺) est considéré comme le centre spirituel de Rokugo Manzan. Situé au centre de la péninsule de Kunisaki, il est très grand et comporte plusieurs bâtiments. Sa situation, au flanc du Mont Futago, en fait un lieu idéal pour une promenade, surtout en automne où il se pare de belles teintes orangées.
Il a été fondé en 718 par Ninmon Bodhisattva, dont la légende dit qu’il a sculpté 69000 Bouddhas de pierre. Comme l’indique le suffixe « ji » (寺), il s’agit d’un temple bouddhiste, et non d’un sanctuaire shinto. Pourtant les éléments spécifiques aux sanctuaires sont tous présents dans son enceinte, cohabitant avec ceux des temples.
Comme il se doit pour un temple, le portail principal de Futago-ji est gardé par des statues nio, gardiennes de l’entrée. Celles-ci sont de grandes statues de pierre très impressionnantes.
Mais le portail du temple est orné d’un élément a priori surprenant : une corde de paille de riz shimenawa et des flammes de papier shidé. Ils symbolisent l’entrée dans un lieu sacré du culte shinto. Autant dire que dès l’entrée les choses sont claires : le Futago-ji reste un haut lieu du syncrétisme.
On reconnaît la corde sur un grand torii de pierre dans l’enceinte du temple. Le torii étant le portail qui symbolise l’entrée dans un sanctuaire shinto.
Nous retrouvons de plus petites statues nio au pied d’un escalier menant à un bâtiment annexe. Elles cohabitent de très près avec un autre torii.
Autour d’un arbre, nous voyons de nouveau une corde shimenawa. Cet arbre abrite donc un kami, une divinité shinto.
Le Futago-ji abrite par ailleurs de très nombreuses statues de pierre, bien bouddhistes cette fois.
Comment s’y rendre ?
• En voiture : la péninsule de Kunisaki étant très rurale, le meilleur moyen de la découvrir reste la voiture. Vous pouvez en louer à l’aéroport d’Oita, à Usa ou Beppu, ou faire appel à un taxi.
• En train : depuis la gare Shinkansen de Kokura, la JR Nippo Line vous emmène à Usa et Kitsuki.
• En avion : l’aéroport d’Oita est situé dans la péninsule de Kunisaki, des vols directs y arrivent depuis Tokyo, Osaka et Nagoya. Des bus depuis l’aéroport permettent de se rendre à Kitsuki, Usa, et de nombreuses autres destinations.
Plus d’informations
Vous trouverez des informations sur la péninsule de Kunisaki (lieux à visiter, hébergements, produits locaux, etc.) sur le site de la Kunisaki Tourism Association (en anglais).
Pour en savoir plus sur la péninsule de Kunisaki, mais aussi sur les autres endroits à visiter alentours, vous pouvez consulter le site de l’office du tourisme (en anglais), ou la version française (un peu moins complète pour le moment).
article réalisé en partenariat avec l’office de tourisme d’Oita