Article réalisé en partenariat avec l’Association de tourisme de Kyushu.
L’île de Kyushu, la plus au Sud des quatre îles principales constituant l’archipel japonais, n’est pas souvent choisie comme point de passage lors d’un premier voyage au Japon. JR pass et jours de congés limités obligent, on privilégie plutôt les plus classiques Tokyo, Kyoto, Osaka ou encore Hiroshima. S’il s’agit néanmoins de votre second voyage au Japon ou que vous vous sentez d’humeur aventurière, un petit détour hors des sentiers battus ne devrait pas vous décevoir. Avec sa nature sauvage et omniprésente, son histoire et patrimoine culturel si riches, ses habitants accueillants et ses spécialités culinaires savoureuses, l’île de Kyushu recèle de trésors à découvrir.
Et si visiter la totalité des sept préfectures de l’île n’est sans doute pas envisageable sur quelques jours seulement, il est tout à fait possible de se concentrer dans un premier temps sur la moitié Nord en rayonnant autour de la ville de Fukuoka. Après avoir proposé quelques idées de visites dans la préfecture d’Oita, suivez-nous désormais à la découverte de la préfecture de Fukuoka !
Avant de démarrer ce nouvel itinéraire de découvertes, précisons tout de même qu’il est possible de se déplacer en transports en commun sur l’île de Kyushu, mais qu’il ne s’agit sans doute pas du mode de transport le plus pratique ni le plus flexible. Afin de profiter au mieux de votre séjour, et notamment du circuit proposé ci-dessous, l’idéal est de louer une voiture sur plusieurs jours afin d’explorer la région à votre rythme. Vous trouverez plus d’informations à ce sujet au lien suivant.
Note: toutes les informations pratiques concernant les diverses adresses données ci-dessous sont à retrouver en fin d’article, sur la carte.
Randonnée à Kawara Olle
En tant que préfecture accueillant la plus grande ville de toute l’île de Kyushu, Fukuoka, on peut avoir tendance à se l’imaginer plutôt urbaine. Et pourtant les espaces naturels ne manquent pas. Pour vous en apporter la preuve, démarrons ce circuit par une randonnée du côté de Kawara, petite ville située à environ une heure de route de Fukuoka.
Je découvre ici un concept de randonnée venu de la toute proche Corée: les olle. Il s’agit tout simplement de sentiers de promenade balisés et aménagés, permettant même aux débutants de se lancer facilement. Le parcours est non seulement très bien indiqué et aménagé d’aires de repos et toilettes, mais il est également fait pour mener ceux qui l’empruntent jusqu’à divers points de vue et monuments à découvrir.
À Kawara, le sentier de randonnée olle a ouvert tout récemment, l’année dernière, sous l’impulsion de la communauté locale afin de dynamiser un peu la région. Tout a d’ailleurs été aménagé par des bénévoles de la ville, principalement à partir de matériaux de récupération trouvés sur place. Le parcours démarre à la gare de Saidosho et se termine en gare de Kawara, pour une distance totale de 12km. Une ligne de train locale reliant les deux gares, vous pourrez par exemple laisser votre voiture au parking de la gare de Kawara, emprunter un train jusqu’à la gare de Saidosho pour démarrer la randonnée, avant de terminer là où vous aurez laissé votre voiture. Il y a quelques années encore, la gare de Kawara, aujourd’hui située à l’arrivée du circuit de randonnée, était vide et fonctionnait sans aucun personnel. Vous y trouverez néanmoins aujourd’hui un bureau dédié aux randonneurs, auprès duquel poser toutes les questions que vous pourriez avoir ou encore acheter quelques souvenirs.
En démarrant la randonnée, on remarque rapidement le système de balisage très clair. Le parcours à suivre est indiqué par des flèches, des rubans ou bien des petits chevaux en fer forgé.
La couleur bleu indique le parcours aller, et la couleur rouge indique le chemin retour si vous souhaitez revenir jusqu’au point de départ.
Hormis ces panneaux de direction et les quelques aménagements présents, on se retrouve totalement immergé en pleine nature, et surtout en pleine verdure ! Champs de riz d’un côté, flancs de montagnes boisés de l’autre et beaucoup d’arbres fruitiers croisés en chemin (kaki, d’ailleurs mascotte de la ville, châtaignes, agrumes japonais nommés kabosu…).
Vous serez également escorté par quelques sauterelles, libellules et grenouilles. Des panneaux recommandent par ailleurs d’être attentifs aux serpents (que je ne croisais heureusement pas lors ma promenade)… Parmi les quelques temps forts du parcours, vous tomberez entre autres sur un tunnel ferroviaire très étroit, les rails se resserrant à ce niveau ne laissant passer qu’un seul train à la fois, une grotte bénie, dédiée aux mineurs qui travaillaient dans les mines de cuivre de la ville, ou encore un point de vue sur la montagne Kawaradake.
Spécialités locales: ramen tonkotsu et glace au charbon de bambou
Et puisque cette randonnée vous aura certainement ouvert l’appétit, le timing est idéal pour aller reprendre des forces en goûtant à l’une des spécialités locales – et pas des plus light ! – le ramen tonkotsu. Le ramen tonkotsu, ou ramen Hakata, a la particularité d’avoir un bouillon préparé à base d’os de porc. Nécessitant plusieurs heures de préparation (jusqu’à huit !) afin de totalement dissoudre la moelle dans le bouillon, il reste néanmoins un plat du quotidien, très abordable. J’ai d’ailleurs pu m’en rendre compte dans le restaurant Yamagoya où j’y goûtais pour la première fois…
Avec les commandes à passer sur une borne et un service très rapide, on s’installe ici pour déguster un plat réconfortant au milieu des locaux qui engloutissent leur bol de ramen à toute vitesse avant de repartir travailler. En entrant dans la salle à manger, l’odeur du bouillon est saisissante, mais pas désagréable, et les “slurps” en coeur des convives viendront titiller vos oreilles. Un simple bol de ramen tonkotsu, servi avec quelques tranches de porc, un oeuf mollet, quelques pousses de bambou et une feuille d’algue, suffira amplement à vous remplir l’estomac. Le bouillon, de couleur presque blanche, a un goût bien plus prononcé et riche que celui d’un ramen traditionnel.
Pour seulement 800 yens, le tout est très copieux et très bon ! Si vous y parvenez, tentez vous aussi d’aspirer vos nouilles bruyamment, cela fera comprendre au chef que vous appréciez votre plat !
S’il vous reste un peu de place pour un dessert, vous pourrez goûter à quelques minutes de là à de la glace au charbon de bambou ! Une spécialité surprenante, d’une couleur très foncée et au léger parfum de chocolat.
Votre langue noircie s’en souviendra un moment…
Gravir le Mont Hiko
Située à une trentaine de minutes de voiture de Kawara, notre prochaine destination est un lieu chargé d’une énergie singulière et mystérieuse. Prenons la route pour le Mont Hiko, ou Hikosan en Japonais, sommet sacré culminant à 1200 mètres d’altitude. Vénérée depuis des siècles, cette montagne est aujourd’hui encore un lieu de pèlerinage et d’entraînement pour les moines bouddhistes issus de la philosophie Shugendo, pratiquant l’ascèse.
Pour gravir son sommet, deux options s’offrent à vous: la randonnée ou le funiculaire. Depuis 2005, un funiculaire de type monorail a en effet été installé à flanc de montagne permettant de se rendre au sommet du Mont Hiko en quelques minutes seulement.
Le tout avec un panorama magnifique; que l’on regarde plus bas vers les reliefs lointains, ou bien en haut, vers le sommet de Hikosan, bien dissimulé par les arbres. Si vous choisissez plutôt l’option randonnée, c’est par un immense torii de cuivre, désigné comme Bien culturel important, que vous serez accueilli.
À l’arrivée du funiculaire, un premier sanctuaire, Hikosan-Jingu, est niché au coeur de la forêt. Si celui-ci se trouvait malheureusement dissimulé derrière quelques échafaudages pour cause de rénovation lors de ma visite, venir goûter à l’atmosphère qui règne là haut vaut déjà le détour.
Entouré d’immenses arbres centenaires, vous pourrez observer les paisibles carpes nager dans l’étang, vous faire bercer par le son des furin, petites clochettes à vent, accrochées au bureau du sanctuaire, ou encore goûter à de l’eau de source naturelle potable de la montagne.
S’il vous reste un peu de temps et de courage, vous pourrez emprunter les escaliers de pierre menant à un second sanctuaire à 2km de là. Installé au sommet du pic central de Mont Hiko, il s’agit de son sanctuaire principal.
S’il est difficile de se résoudre à quitter ce lieu sacré, le superbe panorama offert par le chemin retour en funiculaire vous donnera une bonne raison de redescendre sur terre.
Plongée dans le passé à Iizuka
Prochaine étape, l’ancienne ville minière de Iizuka, située à une trentaine de kilomètres à l’Est de Fukuoka. En pleine période d’industrialisation du Japon sous l’ère Meiji (1868-1912), Iizuka connut un rapide développement en devenant le principal centre de production de charbon de la région. Si la ville peut paraître très paisible aujourd’hui et s’est quelque peu vidée depuis la fermeture des mines dans les années 70, il faut s’imaginer qu’au fort de son activité elle attirait tous les travailleurs sans emploi de la région. Et de quoi les mineurs passant de longues journée à effectuer un travail aussi difficile que dangereux ont-ils le plus besoin ? De divertissement et de douceurs ! C’est ainsi que bon nombre de théâtres et de salons de thé/pâtisseries se mirent à fleurir à Iizuka, qui reste aujourd’hui encore connue pour ça.
Au plus fort de son activité minière la ville comprenait pas moins de 48 théâtres accueillant les mineurs et leur famille, et seul l’un d’entre eux est toujours en activité aujourd’hui: le théâtre Kaho Gekijyo. Il s’agit d’un théâtre à l’architecture inspirée du style kabuki de l’ère Meiji. S’il a été construit pour la toute première fois en 1922, il faut savoir qu’il fut détruit une première fois par un incendie, puis une seconde fois par un typhon avant d’être reconstruit dans sa forme actuelle, de plus petite taille, en 1931. Les intempéries lui causèrent encore quelques dégâts plus récemment, lors d’inondations en 2003, mais tout est aujourd’hui parfaitement restauré, notamment grâce aux dons de quelques acteurs japonais.
L’architecture extérieure est déjà très impressionnante, et n’est pas sans rappeler celle des temples. Mais c’est en pénétrant à l’intérieur que l’on découvre un univers presque magique, d’un style à mille lieues des théâtre occidentaux. Après avoir posé ses chaussures et poussé les rideaux qui séparent l’accueil de la salle de spectacle, on se retrouve plongé dans un Japon d’un autre temps !
Côté public, point de fauteuils en velours rouge mais des tatami, où de petites zones pouvant accueillir jusqu’à quatre personnes sont délimitées par des planches de bois. On assiste donc aux pièces assis au sol, installé sur un coussin. L’ensemble crée un quadrillage au sol très atypique (pour un Occidental du moins) et graphique. Avec ses places en mezzanine ainsi que ses deux espaces sur les côtés réservés aux invités de choix, le théâtre Kaho peut accueillir au total 1200 personnes. On remarque de chaque côté des places assises deux allées en bois menant jusqu’à la scène, les hanamichi, par lesquelles les artistes y font leur entrée. Et la scène justement, parlons-en ! Si le regard est immédiatement attiré vers elle lorsque l’on entre dans la pièce, on n’en remarque véritablement les détails qu’une fois dessus… et dessous !
La particularité de la visite de ce théâtre, c’est que l’on peut passer sous les planches pour aller observer le mécanisme permettant de tourner la scène (manoeuvre nécessitant tout de même 12 personnes) ou de faire entrer des acteurs en les portant du sous-sol à la scène. Quant aux décors et aux rideaux, ils sont tous manipulés et déplacés manuellement, comme à l’époque, à l’aide d’un ingénieux système de cordage et de bambou.
Le théâtre a également pris soin de bien conserver tous les accessoires et déguisements utilisés sur scène depuis le siècle dernier. Vous pourrez prendre le temps de les regarder dans l’une des salles en coulisse ou bien à l’étage, dans la partie musée. Masques, épées, chapeaux… des centaines de trésors sont rassemblés ici.
On trouve également les posters ou tickets d’entrée de spectacles passés, quelques autographes d’artistes ou encore les petites plaques de bois utilisés pour récupérer ses chaussures à la consigne faisant également office de support publicitaire.
Notez que le théâtre livre encore une cinquantaine de représentations chaque année et accueille également un rassemblement annuel de toutes les troupes de théâtre kabuki du pays, le Zenkoku Zacho Taikai, lors duquel des performances sont données toute la journée.
Et une fois cette visite fascinante terminée, direction l’une des autres institutions de la ville: la pâtisserie Chidoriya Honten. Bien plus ancienne que le théâtre tout juste visité, cette pâtisserie a ouvert ses portes en 1630 ! La boutique propose un mélange de douceurs traditionnelles et de desserts imaginés plus récemment, tous plus alléchants les uns que les autres.
Et tout est présenté avec soin, dans des emballages ou boîtes très raffinés. L’ambiance et la décoration sont un brin désuètes et poudrées, comme si l’on avait pénétré dans un petit cocon de nostalgie. Face à un tel choix de confiseries, le personnel aussi prévenant que discret me recommande de goûter à la spécialité de la maison: une sorte de chou au léger goût de miel fourré à la pâte de haricot blanc.
Une petite douceur pas trop sucrée dont la texture fond en bouche. Une boutique à ne pas manquer pour faire le plein de souvenirs locaux, gourmands, et aussi beaux que bons.
Le Parc Ohori à Fukuoka
Si votre itinéraire ne vous laisse pas le temps de faire le plein de nature au Mont Hiko ou à Kawara, ne manquez pas de faire un tour au parc Ohori lors de votre séjour à Fukuoka.
Cette petite oasis en plein coeur de la ville a été aménagée au début du vingtième siècle à partir des douves de l’ancien château de Fukuoka. Je la découvrais pour ma part dans une ambiance très reposante, un matin de septembre en semaine, avec pour seule compagnie quelques joggeurs et cyclistes.
De forme circulaire, entourant un grand étang central, il est très agréable d’en faire le tour en passant par la petite île centrale et ses ponts japonais. L’eau est transparente et paisible, créant le miroir parfait pour refléter les immeubles de la ville au loin.
Et puisque l’eau y est l’élément central, il est bien sûr possible de louer une barque ou un charmant pédalo en forme de cygne pour s’y laisser glisser parmi les carpes, les tortues et les canards.
L’entrée du parc est gratuite et vous pourrez agrémenter sa visite d’un tour dans son jardin japonais ou dans le musée d’art moderne attenant (Tous les deux payants. Notez par ailleurs que le musée d’art est en rénovation et ne rouvrira ses portes qu’en Mars 2019), prendre une collation dans l’un de ses cafés ou bien emmener vos enfants s’amuser dans son aire de jeux.
Passer la nuit à Fukuoka: Stand by Me
Pour passer la nuit à Fukuoka, ou simplement la soirée, rendez-vous à Stand by Me, situé à quelques minutes à pied du parc Ohori. Ce tout nouveau concept d’auberge de jeunesse revisitée a ouvert ses portes l’année dernière, en Juin.
Petit bâtiment sur trois étages à la décoration moderne et minimaliste, on y trouve au rez de chaussée un bar de type tachinomi (un izakaya ou l’on est installé debout, au comptoir ou sur une table haute), et au premier et deuxième de quoi passer la nuit en dortoir (mixte ou pour femmes uniquement) ou dans une chambre privée (une seule chambre de ce type est disponible). On y trouve également une cuisine toute équipée, deux salles de douches et un coin salon/détente au dernier étage.
Côté auberge, tout est soigneusement décoré et propre, mais aussi très calme (sans doute une combinaison de bonne insonorisation et de savoir-vivre à la japonaise…). La petite touche en plus dans cette ambiance moderne et urbaine? Les peintures murales plus ou moins colorées présentes à chaque étage et sur la devanture de l’établissement.
Et côté bar, l’ambiance s’éveille en afterwork où clients de l’auberge comme locaux du quartier prennent un verre au coude à coude. Le concept est simple: en échange de 1000 yens, un serveur vous remettra quelques petits jetons de bois qui vous permettront de commander boissons et petits plats à partager (vous trouverez les équivalences sur le menu).
Tous les incontournables des izakaya sont au menu, parfois légèrement revus à la sauce Stand by Me (je goûtais par exemple à un yuzu sour au lieu du traditionnel lemon sour, cocktail à base de shochu, soda et agrume). L’endroit est plutôt exigu et animé, et il y a fort à parier que vous finirez par discuter avec vos voisins de table !
Après une bonne nuit de sommeil, c’est une toute autre ambiance, beaucoup plus calme, qui vous attendra pour le petit-déjeuner. À choisir plutôt salé et japonais ou sucré façon occidentale, vous pourrez le déguster en regardant les passants ou en jetant un oeil à la carte des meilleures adresses de la ville concoctée par l’établissement.