L’un des festivals d’illuminations les plus impressionnants du Japon a lieu en décembre dans le Kansai : c’est le Kobe Luminarie (神戸ルミナリエ). Et contrairement à ce qu’on pourrait penser au premier abord, il ne célèbre pas Noël mais commémore le grand tremblement de terre de Hanshin-Awaji qui a frappé la région en 1995.
Kobe Luminarie : des illuminations hivernales pour commémorer le grand séisme de 1995
Le premier Luminarie de Kobe s’est déroulé en décembre 1995, comme un message d’espoir pour la population, un peu moins d’un an après le tremblement de terre particulièrement dévastateur qui a frappé la ville et sa région le 17 janvier 1995.
Ce fut un tel succès populaire que ce festival des lumières qui aurait dû ne se tenir qu’une fois se déroule encore tous les ans sur une dizaine de jours début décembre, attirant plus de 3 millions de visiteurs lors de chaque édition.
Il s’agit d’une installation lumineuse monumentale dans les rues du centre ville de Kobe, pensée initialement par l’artiste italien Valerio Festi et par Hirokazu Imaoka. Tous les ans, une équipe vient d’Italie afin de créer de nouvelles décorations, bien que toujours fidèle à la même esthétique. Celle-ci peut d’ailleurs sembler familière aux parisiens : Valerio Festi étant également l’architecte des célèbres illuminations qui ont habillé les Galeries Lafayette durant la période des fêtes entre 2002 et 2012.
Plus que des illuminations modernes de Noël, le Luminarie de Kobe semble s’être inspiré des festivals des lumières italiens, fortement ancrés dans des traditions chrétiennes et qui se sont développés à la Renaissance. On pense notamment au Luminarie de Santa Domenica, à Scorrano, une petite ville du sud de l’Italie, où un impressionnant festival des lumières commémore chaque été la guérison miraculeuse des habitants lors d’une épidémie de peste.
Immersion dans les lumières du Luminarie de Kobe
Je vais être honnête, je ne suis pas particulièrement fascinée par les illuminations hivernales, ni par les événements qui attirent des foules de visiteurs. Mais, vivant à Kyoto, une ville voisine de Kobe, je me suis dit qu’il me fallait aller à la découverte du Luminarie au moins une fois. Et contre toute attente, je n’ai pas regretté ma visite tant ces illuminations sont spectaculaires.
Le Luminarie prend place dans les larges rues du centre ville, habituellement fréquentées par des employés pressés et par les clients des nombreux (et luxueux) magasins du quartier. Les installations monumentales dessinent une architecture de lumière qui transforme la ville à la nuit tombée, comme dans un conte, et la plonge dans un univers onirique et coloré, fortement teinté d’un imaginaire européen et catholique. Cette impression est renforcée par des musiques aux forts accents religieux qui complètent cette atmosphère pour le moins surprenante au Japon mais, il faut bien l’avouer, assez émouvante.
La traversée d’une ville de lumières
Si les illuminations sont renouvelées chaque année, le parcours reste toujours similaire. Les visiteurs passent d’abord par une large rue rectiligne, bordée de hautes arcades multicolores.
Cette longue rue débouche sur une large place plongée dans l’obscurité, où se dresse une structure monumentale que je serais tentée de nommer « cathédrale ». Le parcours s’y fait un peu moins balisé, et petits et grands s’émerveillent de ce bâtiment de lumière dont ils découvrent les dimensions à mesure qu’ils s’en approchent, jusqu’à y pénétrer et se laisser éblouir par ses milliers d’ampoules colorées.
Il est aisé d’imaginer que, comme dans un conte de fées, ce bâtiment merveilleux s’évanouira aux premières lueurs du jour.
Le suite du parcours est plus terre à terre et typique des matsuri : le visiteur retrouve les stands de nourriture indissociables des festivals japonais.
Pour vous plonger dans l’ambiance visuelle et sonore du Luminarie, vous pouvez regarder cette vidéo de Sankei News, tournée lors de l’édition de 2015 :
Accès aux illuminations du Kobe Luminarie
Les illuminations du Luminarie de Kobe sont féériques, c’est un fait. Mais pour revenir à des considérations plus pragmatiques, je dois bien avouer qu’avant d’y aller j’avais quelques inquiétudes concernant la foule : plus de 3 millions de visiteurs en moyenne par an sur une dizaine de jours, ça en fait plus de 300 000 personnes par soir, et même en choisissant un jour de semaine, je me doutais bien que je ne serais pas seule venue profiter de la magie du Luminarie.
Le foule était au rendez-vous, mais l’organisation si réputée des japonais est ici à l’œuvre, et tout est organisé méticuleusement pour que ça ne devienne ni chaotique, ni oppressant. Le parcours est extrêmement balisé : il n’y a qu’un itinéraire possible pour entrer dans les installations, et les visiteurs sont invités à ne pas revenir sur leurs pas ni s’arrêter pour immortaliser l’instant — un point important pour tous les amateurs de photographie : n’espérez pas avoir le temps de prendre de belles images avec un pied, vous ne pourrez vous arrêter que quelques instants pour prendre vos clichés, et ce n’est pas négociable.
Grâce à ces règles strictes, que de nombreux agents sont là pour faire respecter, il n’est pas besoin à proprement parler d’attendre, le chemin qui mène au Luminarie se fait au pas, mais sans heurt. J’ai pour ma part dû compter environ 30 ou 40 minutes avant d’arriver aux illuminations.
Une autre chose à savoir : l’accès est gratuit, mais vous croiserez régulièrement des jeunes portant des urnes, invitant les visiteurs à donner 100 yens. Je ne peux que vous inciter à le faire, cet argent sert à financer le festival, et ce n’est pas cher payé pour le spectacle !
Promenade nocturne à la découverte de Kobe
La visite du Luminarie est finalement assez rapide, alors une fois à Kobe, autant prolonger la visite de la ville de nuit, et ça tombe bien, Nankinmachi (南京町), le quartier chinois de Kobe, et le célèbre port de la ville sont facilement accessibles à pied depuis le quartier où les illuminations sont installées.
Nankinmachi, le quartier chinois de Kobe
Si le Luminarie invite à un voyage dans un univers onirique, Nankinmachi permet de se plonger dans l’ambiance d’une ville chinoise.
Il s’agit d’un des trois quartiers chinois les plus importants du Japon, avec ceux de Yokohama et de Nagasaki. Dès que l’on passe les portiques qui marquent son entrée, on ne se sent plus au Japon : les rues sont ornées de lanternes de style chinois et d’innombrables restaurants proposent souvent de la vente à emporter directement dans la rue.
Ballade romantique autour du port de Kobe
Autre quartier immanquable lors d’une visite de Kobe : le port, où se dresse la célèbre Kobe Port Tower (神戸ポートタワー). La ballade est particulièrement agréable la nuit — et réputée pour être romantique.
Le parc Meriken (メリケンパーク) peut se prêter à de nombreuses visites et activités en journée : tour de Kobe, musée maritime historique, cafés et restaurants, œuvres des street art et d’art contemporain, et même départ de courtes croisières touristiques. On y trouve également le mémorial du grand tremblement de terre de Hanshin.
À la nuit tombée, c’est l’endroit idéal pour une promenade paisible ou un rendez-vous amoureux.
Juste en face du parc Meriken, se trouve Kobe Harborland (神戸ハーバーランド), une zone commerciale et de loisirs qui rassemble des centres commerciaux, des restaurants et cafés, un musée dédié à Anpanman, une grande roue et quelques sites historiques.
À cette période de l’année, une patinoire avait été installée, avec vue imprenable sur la tour de Kobe.
La rue qui relie la gare de Kobe à Kobe Harborland est appelée « Gaslight Street » (神戸ガス燈通り). Elle est éclairée par des becs de gaz à l’ancienne, et illuminée pour les fêtes. Un chemin idéal pour clore (ou commencer), une escapade nocturne à Kobe pendant le Luminarie.
Annulation de l’édition 2021 du Luminarie de Kobe
Les organisateurs ont annoncé en juin que, tout comme l’édition 2020, l’édition 2021 du Kobe Luminarie n’aura pas lieu en raison de la crise liée au COVID-19. Les mesures sanitaires ne permettent en effet pas à l’événement de se tenir à la fois dans de bonnes conditions de sécurité et dans l’esprit qui l’anime depuis sa création. L’installation des œuves lumineuses requiert par ailleurs la venue d’artisans italiens, ce qui la rend dépendante des mesures de restriction d’entrée aux frontières du Japon.
Après ces deux années de crise sanitaire et de restriction des déplacements, il faut espérer que 2022 sera l’année du retour du Kobe Luminarie. Le comité d’organisation se penche tout de même sur la possibilité d’organiser en 2021 un événement de plus petite ampleur, pour commémorer le grand tremblement de terre de Hanshin-Awaji en toute sécurité.
Accès et informations pratiques
Pour se rendre au Luminarie, il est conseillé de descendre à la gare de Motomachi. L’accès est très rapide depuis les villes voisines d’Osaka et de Kyoto.
Comptez environ 30 minutes depuis Osaka et 1 heure depuis Kyoto via la ligne JR Tokaido-Sanyo. Ce trajet est couvert par le Japan Rail Pass.
Si vous préférez commencer ou terminer la visite par Kobe Harborland, la gare la plus proche est Kobe, une station plus loin sur la même ligne.
Mais bien sûr, nous ne pouvons que vous conseiller de venir passer au moins la journée à Kobe, une ville où il y a bien plus à découvrir que le célèbre bœuf de Kobe — qu’il ne faut bien entendu pas manquer de déguster si vous aimez la viande.
Plus d’informations sur le site officiel du Kobe Luminarie (uniquement en japonais).
Le Kobe Luminarie, qui se tient tous les ans depuis 1995 pour commémorer le grand séisme de Kobe, est l’un des festivals des lumières les plus impressionnants du Japon. Ses installations monumentales font naître une ville de lumière dans les rues de Kobe, plongeant les nombreux visiteurs dans une univers onirique qui fait vite oublier la foule.