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À la toute fin de l’été, j’ai eu la chance de faire une escapade de deux jours à la découverte du saké japonais aux portes de Kobe, dans le quartier de Nadagogo, le principal centre de production du nihonshu au niveau national Saké, puis pour explorer Arima Onsen, station thermale historique du Kansai aux belles eaux ferreuses. La nuit se passe à Goshouboh, le plus ancien ryokan des lieux.

Station thermale Arima Onsen

Tout connaître sur le saké de Nadagogo

Au niveau du Japon, le nom de Kobe n’est pas seulement associé au bœuf. Il est aussi associé au saké japonais, c’est-à-dire l’alcool national que les Japonais appellent nihonshu. Depuis des siècles, et particulièrement depuis le début de l’époque Edo (1603-1868), cet alcool de riz y est produit dans le quartier de Nada-gogo, soit les « cinq districts de Nada », à l’Est de la ville.

L’histoire des cinq districts de Nada

Nadagogo est idéalement situé au pied de la chaîne des monts Rokko, sur leur versant sud. Les nombreuses brasseries du secteur possédaient toutes un plan similaire avec deux bâtiments parallèles, au nord et au sud. Les vents froids du nord sont utilisés pour le stockage dans les bâtiments du nord et les vents chauds sont bloqués par les bâtiments du sud, ce qui permet de maintenir des températures basses adéquates. La température joue un rôle crucial à plusieurs étapes de la production. Celle-ci commence en octobre, après la récolte du riz, et dure une cinquantaine de jours en tout, lorsque le saké est préparé selon la tradition.

Tonneau de saké

La situation des brasseries au pied des montagnes permet d’utiliser l’eau des nombreuses rivières à la fois pour son action mécanique (moulins servant au polissage du riz) et comme ingrédient du saké. Cet alcool n’en possède que trois : l’eau pure, plus ou moins minérale, du riz, en général de la variété yamada nishiki, la plus emblématique de la région, et le koji, un champignon qui permet la fermentation.

J’apprends tout cela dès l’entrée du musée de la brasserie Kiku Masamune, dont l’histoire commence en 1659. Elle est l’une des principales d’un quartier qui en compte une dizaine, au sein desquels on retrouve tous les grands noms de cette industrie. La plupart de ces brasseries possèdent un petit musée dédié, mais l’effort muséal est le plus poussé du côté de Kiku Masamune.

En immersion dans la brasserie Kiku Masamune

Le quartier de Nada Gogo à Kobe abrite plusieurs des plus grandes brasseries contemporaines, produisant des sakés parmi les plus vendus du pays. Une dizaine de musées sont à découvrir, appartenant à ces grands noms, pour une plongée immersive dans la tradition du nihonshu, l’alcool japonais par excellence.

L’une des maisons les plus connues est Kiku Masamune, dont l’histoire remonte au début de la période Edo (1603-1868). Elle se dédie à la production de sakés réputés secs, mais malgré tout riches, ce qui leur permet d’être le complément idéal de la plupart des mets japonais. Une partie de la production est assurée selon des méthodes traditionnelles, ce qui donne des alcools haut-de-gamme, réputés et servis dans les bons restaurants de Kobe.

Tonneaux de saké

Kiku dans Kiku Masamune signifie « chrysanthème », ce qui est une manière de placer la production sous des auspices raffinés, la fleur étant celle qui est habituellement associée à la famille impériale au Japon.

Kiku-Masamune Sake Brewery Museum

Au cœur du site de production, le musée de la brasserie Kiku Masamune se concentre sur la technique de brassage traditionnelle kimoto. Il se situe dans un beau bâtiment traditionnel, où sont exposés de façon didactique les accessoires, outils et contenants qui permettent en 50 jours de transformer le riz en saké de grande qualité.

La visite débute par un court film, sous-titré en anglais, présentant le contexte de la récolte du riz, de l’environnement au pied des monts Rokko, de la qualité de l’eau, etc. La salle d’exposition principale présente ensuite les différentes étapes du brassage avec des objets, des dioramas et des photos anciennes, depuis le lavage du riz, sa cuisson, la fabrication du koji – le mélange initial permettant la fermentation – jusqu’au pressage puis au stockage permettant la maturation du breuvage.

La méthode ancienne, plus longue que les procédés modernes car il faut du temps pour que les levures deviennent assez robustes, est encore utilisée par la brasserie Kiku Masamune pour une partie de sa production.

Après la visite, je peux déguster gratuitement deux sakés, ce qui est automatiquement inclus dans la visite. Puis, contre quelques euros, chacun peut goûter à une sélection de sakés plus prestigieux, grâce à un distributeur dédié.

Plus d’informations sur le site officiel (en anglais).

Le musée des coupes à saké – Sakazuki Museum

Le Sakazuki museum, dédié aux coupes dans lesquelles boire le saké, est le petit dernier des musées aménagés par la brasserie Kiku Masamune. Il a ouvert en 2022. Comme pour son grand frère le Taruzake Meister Factory, il utilise judicieusement une muséographie contemporaine, épurée, permettant de bien mettre en avant les pièces exposées et de se concentrer sur l’histoire et la chronologie des coupes à saké.

Coupes pour boire le saké

Le but de ce troisième musée est bien de revenir sur les contenants utilisés pour apprécier le nihonshu, cet alcool subtil assez comparable au vin, ainsi que sur les utilisations de ce dernier le long de l’histoire japonaise.

Près de 400 pièces sont exposées en permanence – le musée étant ouvert en trois courtes séquences chaque jour, de façon à coïncider avec les démonstrations de fabrication de tonneaux de saké, trente minutes après ces dernières (lire ci-dessous). La collection en compte quatre fois plus, depuis les contenants primitifs, en terre cuite ou coquillages, jusqu’aux porcelaines raffinées de l’époque Edo, dont les fins détails mettent en avant les arts et la géographie japonaise. L’exposition principale comporte aussi des carafes, des cruches ou de grandes boîtes de bois qui étaient utilisées pour le transport sur les épaules, deux par deux, de part et d’autre d’un long bâton.

Préserver l’artisanat tonnelier à la Taruzake Meister Factory

Si l’histoire des coupes et contenant est indéniablement intéressante, la séquence sur la tonnellerie est de son côté la plus impressionnante et la plus physique : pas pour les visiteurs, mais pour deux artisans qui fabriquent littéralement un tonneau en quelques dizaines de minutes !

La brasserie Kiku Masamune est la principale productrice au niveau national de taruzake, le nihonshu vieilli en fûts de cèdre, à plus de 80%. À ce titre, elle a ouvert en 2017 un nouveau lieu d’exposition dédié à l’artisanat des tonneliers, au sein duquel il est possible d’en apprendre davantage sur la production de ces fûts essentiels, appelés taru en japonais, mais également d’observer cette fabrication en direct. Un maître de cet art et son apprentie assurent des démonstrations trois fois par jour, ce qui permet de réaliser à quel point cette production est physique.

Tout commence dans le département de Nara, à Yoshino, ou les cèdres sugi recouvrent à perte de vue les collines et montagnes. Ces arbres très rectilignes et odorants sont la matière première idéale pour les tonneaux. Les cèdres utilisés ont en moyenne cent ans. Il faut méthodiquement les réduire en planchettes, avant d’assembler ces dernières à la main, dans des cercles de métaux qui sont ensuite progressivement remplacés par des tresses de bambous. Le tonneau créé est ensuite rendu étanche par serrages et rabotages successifs du fût. Ni clou ni colle ne sont utilisés. Une fois prêts, les tonneaux servent pendant quelques jours, ce qui suffit pour que le saké prennent les arômes subtils du bois.

Plus d’informations sur le site officiel (en anglais).

Une nuit dans la tradition japonaise à Arima Onsen

Après toutes ces explications sur le saké, les coupes, les tonneaux, il est grand temps de prendre la direction d’un autre monument de la culture japonaise : une station thermale. Et pas n’importe laquelle ! Car Arima Onsen est l’un des noms les plus réputés de l’Ouest du Japon.

Arima Onsen, station thermale historique

Arima Onsen est la station thermale la plus proche de Kobe et d’Osaka, et donc la plus favorisée par les puissants pendant tous les siècles où le cœur du pouvoir japonais se trouvaient dans le Kansai. Le site montagnard, niché entre des rivières aujourd’hui canalisées, fut par exemple très apprécié par Toyotomi Hideyoshi, le deuxième des trois principaux unificateurs du Japon, à la fin du 16e siècle. Mais l’histoire du lieu est de 1000 ans plus ancienne.

La station thermale possède deux bains différents : le bain d’or (kin-no-yu) et le bain d’argent (gin-no-yu), un peu plus haut dans le centre. Deux sources différentes les alimentent, et j’ai été très surpris par les eaux de la première, tout à fait uniques : elles sont orange bouillonnantes, très chargées en fer et donc salées au goût.

Bain extérieur au ryokan
L’eau si remarquable de la source kin-no-yu, ici dans le ryokan Goshoboh.

L’excellence hôtelière au ryokan Tocen Goshoboh

Le ryokan Tocen Goshoboh remonte à 1191, ce qui en fait l’établissement le plus ancien et le plus célèbre d’Arima Onsen. Il comporte un ensemble de bâtiments au charme labyrinthique, entre boiserie, tatamis et détails épurés qui insistent sur l’histoire du lieu et les hôtes célèbres, notamment l’écrivain Junichiro Tanizaki (1886 – 1965), ce dernier mentionnant même l’établissement dans un de ses livres. Le petit-déjeuner et le dîner sont l’occasion de s’essayer à la cuisine raffinée des ryokans, qui met en avant les produits locaux de saison.

Le menu m’a permis de goûter à de la daurade grillée, à des tempuras aériennes, mais surtout à du bœuf du Kobe, sous la forme d’un bout de filet subtilement grillé. Ce qui constituait une mise en bouche parfaite pour le lendemain.

Plus d’informations sur le site officiel (en japonais).

Comment se rendre à Kobe et Arima Onsen ?

Kobe est très facile d’accès en shinkansen depuis Tokyo (2h40) ou Osaka (15min). La circulation en ville est ensuite assez simple avec les lignes de métro et le train local, mais il faudra envisager le bus ou le taxi pour rallier le quartier de Nadagogo et les brasseries.

Pour Arima Onsen, le trajet est rapide, en moins de 30 minutes depuis le centre ville en train. Il suffit de passer de l’autre côté des monts Rokko.

Article écrit en partenariat avec KOBE TOURISM BUREAU.

Julien

Julien

Freelance travel consultant based in Tokyo, I have been living in Japan for a couple of years. In France, I have published three books about Japanese destinations and culture, the first one being the description in texts and photos of a hundred views in Japan. I am deeply interested in sustainability and a more human-based way of traveling.