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Un passant s’approcha du temple bouddhiste vieux de 200 ans, nous saluant après avoir passé le portail de pierre. Le temple Hosho-in, maintenant officieusement connu sous le nom d’Oteragoto, est l’un des 88 sites du pèlerinage de Goto, sur l’île de Fukue. Bon nombre de visiteurs curieux et de pèlerins y passent parfois pour faire une prière rapide ou pour obtenir le précieux tampon de collection goshuin du temple. Nous venions de terminer notre séance de yoga matinal et de méditation dans le hall principal, quand Manami Onishi, l’actuelle propriétaire des lieux, vint accueillir le visiteur et lui permit de jeter un coup d’œil à l’intérieur. Une matinée typique à Oteragoto, le temple japonais où je venais de passer une nuit calme et reposante. 

Le temple Hosho-in, un petit temple bouddhiste japonais à Fukue dans les îles Goto

Préserver la tradition et l’histoire du temple d’Oteragoto 

La façon dont la jeune Manami-san est devenue responsable de l’entretien d’un temple vieux de deux siècles dans les îles Goto risque de vous laisser quelque-peu perplexe. Elle a grandi loin de là, dans la préfecture d’Okayama, et n’a commencé à vivre à Goto qu’à partir de 2018, lorsqu’elle a pris possession du temple et de la maison annexe. Le temple était autrefois entretenu par son grand-père maternel. À son décès, aucun de ses enfants n’a souhaité en assumer la responsabilité. Manami-san est venue à Goto avant tout pour être près de sa grand-mère. Grâce à son expérience dans l’industrie du tourisme à Okayama, elle a alors eu l’idée d’ouvrir le temple au public. Ainsi, celui-ci servirait à la fois d’étape sur la route des pèlerins, mais aussi de lieu de découverte des innombrables objets religieux aux origines longtemps oubliées, dissimulés dans le temple. 

Ainsi, en 2018, Manami-san a quitté son emploi dans le secteur hôtelier à Okayama et a déménagé à Goto pour s’occuper du temple. Ce n’était pas une décision à prendre à la légère ; ni elle ni aucun des membres de sa famille n’avaient une grande connaissance des aspects spirituels du temple ni du bouddhisme Tendai en général. Même son grand-père pratiquait rarement les rituels associés au temple, et quand il le faisait, il était le plus souvent payé non pas en espèces, mais en riz et en légumes. Sa principale activité était celle d’un employé japonais ordinaire. 

Ce manque de connexion avec les pratiques spirituelles du bouddhisme est profondément enraciné dans le passé d’Oteragoto. Le temple aurait été construit en 1816, afin que l’un des seigneurs féodaux de Goto puisse vouer un culte à Fudo-myoo, le gardien bouddhiste vénéré par la secte Tendai. À l’époque, c’était le seul temple bouddhiste Tendai de Goto et de ce fait, il n’avait aucun lien avec les autres temples de l’île. Par conséquent, Oteragoto n’avait pas les responsabilités des temples bouddhistes traditionnels comme les cérémonies funéraires ou l’entretien d’un cimetière, et ne touchait donc pas les revenus liés à ces activités ; de sorte que les prêtres du temple devaient toujours compter sur d’autres sources de revenu pour survivre. 

Autel dans un temple bouddhiste japonais rural sur les îles Goto

Cette histoire à ses avantages comme ses inconvénients pour Manami-san ; d’un côté, on n’attendait pas d’elle qu’elle connaisse les aspects religieux du temple pour qu’elle en soit responsable. Mais d’un autre côté, le temple n’avait aucune source de revenu à lui seul, et Manami-san devait donc amener ses propres idées pour avoir suffisamment de revenus et garder le temple ouvert. C’est ainsi que l’idée d’un « séjour au temple » est née à Oteragoto. 

En raison d’un manque de revenus, l’entretien du temple a été négligé pendant un certain temps et des réparations urgentes du bâtiment étaient nécessaires. Manami-san s’est rendu compte qu’en tant qu’organisation religieuse, elle ne pourrait pas recevoir de subventions gouvernementales, bien que le bâtiment soit un bien culturel important. Mais grâce à son expérience dans l’industrie hôtelière, elle savait qu’une aide gouvernementale était disponible pour les rénovations touristiques. Un jour, se plaignant de son dilemme avec un ami propriétaire d’une maison d’hôtes, celui-ci lui suggéra : « Pourquoi ne pas transformer une partie du temple en hébergement ? ». 

Hébergement traditionnel japonais privé au temple d’Oteragoto 

J’ai eu la chance de séjourner dans le bâtiment rénové né de cette conversation, une annexe du temple qui contient désormais une grande chambre de style japonais, une petite cuisine, deux toilettes et une salle de bain dotée d’une luxueuse baignoire. L’annexe peut accueillir jusqu’à trois personnes en toute simplicité, et ressemble beaucoup plus à une maison qu’à un hôtel. 

Salle de bain japonaise recouverte de carrelage bleu

Les rénovations ont été achevées en 2019 et Manami-san a tout conçu du sol au plafond, de la conception à la décoration. Vous remarquerez que la baignoire carrelée de bleu est vaste, assez grande pour accueillir deux personnes, une caractéristique sur laquelle elle a insisté pour le bon plaisir de ses convives. Avoir deux lavabos et deux toilettes à disposition est un luxe rare au Japon pour les structures hébergeant des petits groupes. Mais elle a tenu à les inclure pour plus de commodité. 

Partout, vous trouverez des créations de Manami-san et sa patte artistique ; même les portes de la salle de bain sont dotées de minuscules fenêtres aux vitraux translucides réalisés par ses soins. Influencée par sa précédente expérience professionnelle sur l’île artistique de Naoshima, elle souhaitait créer un espace à la fois original et artistique, qui soit inspirant pour ses invités. Ici, les objets fabriqués à la main remplacent les articles du quotidien qu’elle aurait pu se procurer à bas prix dans une boutique à 100 yens.  

Sans surprise, la cuisine était approvisionnée de paquets de nouilles Goto udon, de bouillon dashi local, de lait de Goto dans le réfrigérateur et même de produits faits maison comme des prunes marinées umeboshi et du thé local. La qualité des produits cosmétiques mis à disposition surpasse celle des hôtels de luxe dans lesquels j’ai eu l’occasion de séjourner et met en avant les produits locaux de Goto, notamment les lotions et savons à l’huile de tsubaki (camélia). 

Ce fût une froide soirée de décembre et Manami-san avait allumé le chauffage pour que je trouve ma chambre à température idéale quand j’y suis entré après le dîner. Un kotatsu (table avec une couverture chauffante), l’une des meilleures inventions japonaises pour l’hiver, était également disponible dans la pièce et je me suis assis pour travailler pendant un moment sur mon ordinateur portable avant de profiter d’un bon bain et de me coucher. En parlant de lits, les futons d’Oteragoto sont si mœlleux et épais que vous ne serez pas gêné un instant de l’absence de lit. 

Yoga matinal et méditation dans un temple japonais 

J’ai réglé mon réveil à 6h30 le lendemain matin car j’allais participer à une séance de yoga matinale dans la pièce principale du temple à 7h00. Manami-san invite régulièrement Akiko Umezawa, la professeure de yoga locale, à utiliser le temple pour ses séances de yoga publiques et privées. C’est là toute l’idée : rendre le temple accessible aux résidents de Goto en organisant des événements et des activités intéressantes pour les habitants et les touristes. Pour moi, c’était l’occasion de faire quelques étirements et de méditer aux aurores avant de commencer ma journée d’exploration à Goto

Séance de yoga matinal dans un temple bouddhiste japonais rural sur les îles Goto

Umezawa-san fut très tolérante avec mon manque de souplesse, et ajusta notre session avec des activités adaptées pour éviter tout inconfort majeur. Dans mon cas, elle a décidé d’inclure davantage d’exercices de relaxation, de méditation et de respiration, ce qui collait parfaitement avec le cadre dans cet ancien temple bouddhiste. Au fur et à mesure que nous nous entraînions, la lumière du soleil commençait à pénétrer dans la pièce à travers les portes coulissantes. Je sentais une douce sensation de bien-être m’envahir, jusqu’à ce que… 

Un chat fit soudain éruption en surgissant dans pièce par l’une des portes coulissantes shoji, avant d’atterrir sur le sol de tatami dans un bruit sourd. C’était l’un des trois chats de Manami-san. Il s’était frayé un chemin en griffant le papier de riz d’une des portes coulissantes, apparemment frustré de ne pas pouvoir entrer dans la pièce à sa guise. Déconcertés et surpris de son entrée spectaculaire, nous sommes restés un instant sans voix avant de tous rire de bon cœur.  

Séance de copie de sutra en compagnie d'un chat

En effet, les chats de Manami-san font également partie du décor dans le temple. Je me suis demandé si elle les avait formés à l’omotenashi, l’art de l’hospitalité japonaise, car ils semblaient toujours être à proximité pour me saluer ou vérifier ce que je faisais. Si vous aimez les chats, ils feront certainement partie intégrante de votre expérience ici. Les chats ne sont pas autorisés à pénétrer dans la zone annexe réservée à l’hébergement, mais vous les croiserez surement autour du temple et parfois même, d’une manière très singulière, dans le temple lui-même ! 

Méditation par la copie de sutra au temple 

Après une journée de visite dans la ville de Goto, je suis retourné à Oteragoto pour une autre expérience de méditation : la copie de sutra. On dit que le fait de recopier les écritures bouddhistes en traçant les kanji (caractères chinois) à l’aide d’un pinceau et d’encre soutient les fidèles dans leur cheminement spirituel bouddhiste. C’est également une forme d’exercice mental méditatif pour le moins relaxant. Pour ceux qui ont du mal à copier les kanji, Manami-san peut également fournir une image de Fudo-myoo à tracer, exercice à l’effet tout à fait similaire. 

Après avoir recopié le sutra ou l’image, vous pouvez écrire un vœu sur le papier. La feuille peut ensuite être rapportée à la maison en tant qu’amulette, ou être brûlée au temple plus tard, votre vœu s’élevant jusqu’aux dieux bouddhistes à travers la fumée. Étant donné la piètre qualité de la calligraphie de ma copie de sutra, j’ai choisi de faire disparaître toutes les preuves en la brûlant… allez, puisse mon souhait disparaître dans la fumée et parvenir jusqu’au ciel !  

Une exceptionnelle expérience de séjour dans un temple sur les îles Goto 

Passer une nuit dans un temple au Japon n’est pas chose rare ; Koya-san à Wakayama est un lieu très populaire pour ce type d’expérience, qui intéresse de nombreux visiteurs étrangers. Cependant, Oteragoto est singulier car il s’agit ici d’une expérience dans un cadre entièrement privé, séjour pouvant être adapté aux souhaits du groupe ou des résidents.  

De plus, Oteragoto est un lieu de séjour unique car Manami-san fait tout ce qu’elle peut pour le rendre attrayant ; l’accent mis sur les produits locaux et artisanaux pour la décoration, la qualité des équipements, l’atmosphère détendue encourageant les visiteurs à prendre le temps de profiter de leur voyage… Elle a créé Oteragoto comme un séjour hors des sentiers battus pour que les voyageurs fatigués du monde entier puissent se ressourcer.  

Article écrit en partenariat avec la ville de Goto
Traduit de l’anglais par Manon

Todd Fong

Todd Fong

Freelance writer, photographer, and mentor. Japan-based, Oaktown (Oakland, California) born. Freelance writing and photography work includes Lonely Planet, Voyapon, Metropolis Japan, and many regional tourism websites around Japan.

https://www.toddfong.com

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