Niché entre Hokkaido, le territoire le plus vaste du Japon, et le Kanto, la région la plus peuplée de l’archipel, le Tohoku reste un mystère pour beaucoup de voyageurs. Souvent vantées pour leur beauté, ses six préfectures offrent également nombre d’expériences culturelles.
Visiter le Tohoku, c’est une occasion rare de découvrir la vie quotidienne de ses habitants, de la partager avec eux, et même de s’initier à leur culture ancestrale. Dans un monde au sein duquel la plupart des destinations sont pensées pour les touristes, cette somptueuse partie du Japon offre la possibilité de découvrir une facette plus authentique du pays, sans jamais faire l’impasse sur le confort et le raffinement qui font la réputation du Japon.
Voici une synthèse des plus beaux moments de ma semaine passée dans le Tohoku durant l’automne, au cours de laquelle j’ai eu la chance de découvrir 5 de ses préfectures : Aomori, Akita, Yamagata, Miyagi, et Fukushima, offrant chacune son lot de sites naturels, d’hébergements raffinés, de découvertes culturelles et de délices culinaires.
- Aomori : immersion culturelle dans les « forêts bleues »
- Akita : au royaume du riz, des brasseries, et des onsen secrets
- Yamagata : une terre de bateliers chanteurs, de temples cachés, et d’onsen historiques
- Miyagi : goûtez à un whisky de renommée mondiale et séjournez dans un village onsen vieux de 600 ans
- Fukushima : des couleurs et des sourires
- Comment se rendre dans le Tohoku
Aomori : immersion culturelle dans les « forêts bleues »
La préfecture d’Aomori, située à l’extrémité nord du Tohoku, est le point de départ idéal d’un voyage dans la région. Facile d’accès depuis Tokyo via le Shinkansen (compter 3h30), Aomori est parcourue d’une nature colorée et de petites villes dynamiques, et compte certains des hébergements les plus élégants du Japon.
Voici certaines de mes expériences à Aomori, qui m’ont permis de mieux comprendre les particularités culturelles de la préfecture, en cohérence avec la célèbre richesse de sa nature.
S’initier à la conception de lanternes colorées à IRODORI
Aomori est surtout connue pour son Nebuta Matsuri, organisé chaque année en août. Ses grands chars de papier coloré ont valu au Nebuta d’être reconnu comme l’un des festivals d’été les plus saisissants du pays, voire même le plus célèbre de la saison ! Dans la préfecture, c’est en fait tout un ensemble de Nebuta qui sont organisés, dont le Ningyo Nebuta d’Aomori et ses chars hauts de 5 mètres, celui de Goshogawara et ses structures de 23 mètres, et les éventails géants de 4,5 mètres du Nebuta de Kuroishi.
Si ce festival, qui permettait à l’origine de distraire les habitants du Nord pendant les mois humides de l’été, n’est organisé qu’une fois par an, l’esprit qui l’anime reste perceptible toute l’année durant. Pour nous plonger dans cette tradition, nous avons commencé notre voyage en participant à un atelier d’initiation dans la boutique IRODORI, située dans la charmante ville de Kuroishi (黒石市), à 45 minutes de voiture de la ville d’Aomori. L’occasion pour les visiteurs de découvrir les coulisses du festival.
Par souci d’écologie, les propriétaires d’IRODORI ont eu l’idée de réutiliser les chutes de papier résultant de la fabrication des chars du festival pour proposer des ateliers d’initiation qui permettent aux voyageurs de créer leur propre lanterne. L’activité, qui consiste à coller plusieurs morceaux de papier sur un cadre de bois en suivant les consignes du propriétaire, n’est pas trop complexe. C’est une expérience relaxante qui permet d’en apprendre plus sur le Nebuta, du point de vue des habitants.
Hirosaki : dîner raffiné, art moderne, et pommes juteuses
Après cette matinée pleine de couleurs à Kuroishi, nous nous sommes rendus dans la ville animée de Hirosaki (弘前市). Si le Tohoku est connu comme l’une des destinations idéales pour découvrir la culture traditionnelle japonaise, la région possède également nombre de pépites architecturales et de particularités héritées des cultures occidentales.
Durant la restauration de Meiji, qui débuta en 1868, Hirosaki fit partie des villes qui invitèrent de nombreux étrangers occidentaux afin de faciliter les échanges culturels, et d’accélérer l’intégration du Japon au reste du monde après une longue période d’isolement. Ces échanges entraînèrent ici l’ouverture de nombreux restaurants de gastronomie française. Le restaurant Yamazaki fait partie de ces adresses où vous pouvez être certain de profiter d’un repas à la fois gourmand et raffiné. Étant déjà fan de cuisine française, j’ai apprécié la touche originale du chef qui intègre à ses plats des produits locaux typiques de la région d’Aomori, faisant surgir des saveurs inattendues qui se marient à la perfection à celles de la gastronomie française.
Le plat signature du restaurant est une soupe froide de pommes, accommodant ces pommes qui font la renommée de la région. Cette création délicate aux arrière-goûts surprenants plaira même à ceux qui, comme moi, ont moins d’affinité avec le sucré. Le restaurant Yamazaki propose plusieurs menus, où se côtoient, entre autres, poulet rôti, coquilles Saint-Jacques, saumon ou bœuf wagyu.
Pour en apprendre davantage sur les pommes de la soupe de Yamazaki, nous partons ensuite visiter le Hirosaki Apple Park, au sein duquel sont cultivées 80 variétés de pommes Fuji, typiques d’Aomori qui en assure la moitié de la production nationale. Le parc offre la possibilité d’acheter toute une sélection de produits à base de pomme, mais aussi de cueillir soi-même de belles pommes juteuses dans un cadre superbe, au cœur des montagnes d’Aomori.
Notre dernière étape à Hirosaki se fera au Musée d’Art Contemporain, installé au sein d’un beau bâtiment de briques qui fut autrefois une brasserie. Le musée se donne pour objectif de proposer deux expositions temporaires chaque année, afin de promouvoir le Tohoku, son histoire et son ancrage dans le monde international de l’art. Le musée fait une excellente utilisation de son bâtiment, construction européenne qui fut abandonnée pendant plusieurs années. La boutique et le café du musée tiennent maintenant un rôle important pour les habitants du coin, qui viennent se détendre durant l’happy hour en buvant du cidre.
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BUNACO : Un artisanat contemporain et primé
Les richesses naturelles d’Aomori n’ont pas seulement permis l’émergence de sa succulente gastronomie locale, l’artisanat du bois s’y est développé et perfectionné au point d’être plusieurs fois récompensé. L’atelier BUNACO, situé dans le village de Nishimeya (西目屋村), occupe un bâtiment qui fut autrefois une école. Ici, les visiteurs peuvent découvrir les différentes étapes d’un artisanat manuel et presque méditatif qui permet notamment de créer des lampes, de la vaisselle, ou des enceintes – astucieusement exposées dans l’ancienne salle de musique de l’école.
BUNACO utilise du bois de hêtres – Aomori est doté de la plus forte concentration de hêtres du Japon – dont l’élasticité facilite la création d’objets d’art et d’artisanat. Voir une planche de bois se transformer en objet en quelques minutes grâce aux gestes minutieux des artisans est une expérience fascinante. BUNACO propose également des ateliers d’initiation dans une grande salle d’exposition où l’on retrouve une belle sélection de l’artisanat produit sur place.
KAI Tsugaru : un séjour de luxe dans les forêts d’Aomori
Je n’ai jamais été déçue par la qualité des hébergements d’Aomori, qui offrent, au-delà de leur confort, une immersion culturelle au cœur des traditions de la préfecture.
Sachant cela, il n’est pas surprenant de retrouver ici l’un des 22 hôtels KAI, l’une des marques de la chaîne d’hôtels de luxe Hoshino. Les hôtels KAI, installés exclusivement sur des sources thermales, réussissent à combiner les traditions japonaises des ryokan et le confort des chambres occidentales.
Équipé de vertigineuses fenêtres permettant d’être en permanence connecté à la forêt, Kai Tsugaru se ressent comme une expérience, parvenant à offrir à ses clients le meilleur d’Aomori le temps de leur séjour sur place. Au dîner kaiseki servi dans l’intimité d’une table isolée, et au bain chaud rehaussé de pommes d’Aomori, s’ajoute une faveur de luxe : un concert privé de Tsugaru Shamisen par M. Shibuya, champion national de l’instrument.
Dans le style Tsugaru, le shamisen, guitare japonaise à trois cordes, nous plonge dans des souvenirs rythmés de tempêtes de neige (ce qui est parfaitement approprié pour cette région enneigée). Joué à l’origine par des moines aveugles pour recueillir des dons, l’instrument et le genre musical dont il est ambassadeur sont en train de regagner en popularité au Japon. Ici, à KAI Tsugaru, vous pourrez non seulement écouter une performance jouée devant vous, mais aussi vous essayer au shamisen, en compagnie d’artistes qui prennent le temps d’accompagner chaque convive.
Akita : au royaume du riz, des brasseries, et des onsen secrets
Nous avons ensuite visité la préfecture d’Akita, couverte à 70% de forêts. Un territoire au fort enneigement, qui regorge d’onsen cachés au fond des bois, et dont la qualité de l’eau et du riz fait sa renommée au Japon, il n’est donc aucunement surprenant d’y trouver de nombreuses brasseries.
Découvrir le brassage traditionnel dans la brasserie Ando
La brasserie Ando est située au cœur historique d’Akita : à Kakunodate, dans la ville de Semboku (仙北市), accessible depuis Tokyo en trois heures de Shinkansen. Il s’agit de la destination idéale pour débuter son voyage dans la préfecture. Les propriétaires de cette brasserie familiale, qui célébrera ses 170 ans en 2023, sont des gens très chaleureux, qui rayonnent d’une fierté contagieuse pour leur ville. Dans leur brasserie, qui produit du miso et de la sauce soja à partir d’ingrédients naturels, on perpétue les gestes ancestraux du brassage traditionnel : à la main et sans additifs.
Le bâtiment de brique dans lequel la brasserie est installée, inscrit au patrimoine culturel de la ville de Semboku, justifie à lui seul une visite.
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Yamano : une brasserie pas comme les autres
La brasserie Yamamo, à Yuzawa, est une brasserie comme vous en verrez rarement. Là où Ando perpétuait des techniques traditionnelles de fabrication du miso et de la sauce soja, Yamamo est réputée pour son approche plus expérimentale du brassage – le site a pourtant été fondé en 1867. Les visites des deux se révèlent ainsi complémentaires pour découvrir à la fois les traditions et les innovations de l’art du brassage.
Les choix d’aménagement intérieur, qui mêlent la rusticité occidentale et la finesse japonaise, permettent déjà de deviner que Yamano n’est pas une brasserie comme les autres. Son penchant historique pour l’expérimentation lui a permis de découvrir une nouvelle levure innovante, pouvant fonctionner avec ou sans sel. La brasserie possède le brevet de cette nouvelle levure – VIAMVER – ce qui lui permet d’ouvrir sa production à d’autres horizons, comme la production de vin.
L’ensemble formé par le restaurant, la brasserie, et son magasin m’ont d’ailleurs fait penser aux domaines viticoles européens. Le propriétaire actuel, Yasishi Takahashi, n’a pas seulement souhaité créer un espace de vente, mais bien un lieu qui permettrait aux visiteurs de se plonger dans le processus de fabrication. La visite peut être assortie de dégustations, en option, qui permettent notamment de goûter à des plats préparés à partir du miso produit sur place. Je vous recommande tout particulièrement le confit fermenté de gibier, et la glace au soja, tous deux préparés à l’aide de la levure VIAMVER. Deux plats dont l’intitulé peut étonner au premier abord, mais dont les saveurs subtiles s’avèrent succulentes !
Goûter aux spécialités locales d’Akita dans un petit restaurant
Mieux vaut éviter de grignoter durant un voyage dans le Tohoku, car vous aurez de nombreuses autres opportunités de goûter à la cuisine de chaque préfecture, que ça soit lors d’un déjeuner sur le pouce, ou d’un long dîner kaiseki.
Dans la ville d’Odate (大館市), toujours dans la préfecture d’Akita, de nombreux restaurants servent l’une des fiertés culinaires de la région, le poulet Hinai Jirodi. Réputé pour sa viande peu grasse et ses saveurs intenses, le poulet Hinai Jidori est connu pour être l’une des trois meilleures viandes de poulet du Japon. Habituellement servi sur du riz dans un bol en bois, ce plat est si savoureux qu’il était autrefois réservé aux seigneurs. Les œufs battus, mêlés au poulet et au riz, enrichissent encore les saveurs de ce plat déjà succulent. Akita Hinai Ya est l’un des restaurants où goûter à cette spécialité d’Akita dans un environnement chaleureux, au contact des habitants.
Décorez vos propres assiettes grâce à la laque de Kawatsura
Akita ne se résume pas à la nourriture ! Dans la ville de Yuzawa (湯沢市), le Kawatsura Lacquerware Traditional Craftsmen Center, un centre culturel dédié à la laque du même nom, vous permettra d’en apprendre plus sur l’utilisation de la laque dont les Japonais se servent pour embellir le bois, et vous pourrez même en profiter pour vous y initier.
L’histoire de la laque à Kawatsura s’étire maintenant sur plus de 800 ans. Une histoire qui aurait commencé avec son utilisation sur les armures des guerriers, avant de devenir une industrie à part entière au début du 17e siècle, principalement centrée autour de la fabrication des bols.
Le centre culturel abrite un petit musée et une grande salle d’exposition où vous pourrez admirer tout un éventail de produits laqués, comme des bols et des baguettes. Le centre propose également deux ateliers d’initiation : une initiation au Chinkin qui consiste à incorporer des feuilles d’or sur les motifs d’une surface laquée, et un atelier de Maki-e. Ces deux activités sont encadrées par des artisans expérimentés qui vous guideront patiemment au fil des étapes.
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Yukemuri no Yado Onsen : un luxe empreint de simplicité
Après cette journée bien remplie à Akita, je me suis rendu à Yukemuri no Yado Inazumi Onsen Hotel. Situé à Akinomiya Onsen, la plus ancienne station thermale de la préfecture, il s’agissait de l’hébergement idéal pour un moment de détente. Je peux le classer sans hésiter parmi les meilleurs hôtels japonais dans lesquels j’ai eu la chance de séjourner jusqu’à présent. Le style indéniablement luxueux de l’établissement lui vient de ses choix de décoration, simples mais élégants, pensés pour que chacun se sente à l’aise dès son arrivée.
Dans les chambres, de belles baignoires de bois débordant d’eau thermale nous attendaient. L’hôtel dispose aussi de bains communs, dont un superbe rotenburo (bain en plein air) dans la forêt. Mieux vaut séjourner au moins deux nuits au Yukemuri no Yado pour en apprécier toutes les facettes et se détendre pleinement. Notre dîner sur place a duré deux heures, durant lesquelles se succédaient des plats de légumes, de viande et de poisson tous plus raffinés les uns que les autres. Chaque groupe est installé dans sa propre salle à manger privative, offrant un cadre particulièrement agréable pour partager des discussions autour d’un long repas arrosé de saké.
Yamagata : une terre de bateliers chanteurs, de temples cachés, et d’onsen historiques
Yamagata, notre destination suivante, est une préfecture que l’on pourrait croire sortie d’un livre d’histoire. Le lieu idéal pour mettre de côté son quotidien et s’aventurer dans une autre époque, où l’on s’éclaire à la lanterne, où les bateliers fredonnent sur la rivière, et où des temples millénaires perdus au fin fond de vastes forêts attendent les voyageurs téméraires.
Le fleuve Mogami, inspiration des poètes
Notre découverte de Yamagata a commencé par un voyage de 12 kilomètres à bord d’une embarcation traditionnelle le long du fleuve Mogami (最上川), le septième plus long du Japon. Naviguer au cœur des couleurs flamboyantes de l’automne qui se déployaient sur les rives tout en étant bercé par les chants folkloriques des bateliers vêtus de costumes traditionnels fut une expérience particulièrement riche en émotions.
Après seulement quelques minutes sur les eaux, j’ai compris ce que ressentait le poète Basho quand il écrivit les haïkus dédiés au fleuve Mogami et aux cascades qui s’y jettent.
Bien que la majeure partie du voyage se fasse sur des eaux calmes, l’embarcation traverses par moment quelques rapides – ce qui ajoute un peu de piment à l’expérience ! J’espère avoir l’occasion de revenir en hiver pour pouvoir admirer ces paysages couverts de neige, d’autant plus que j’ai appris que les bateaux sont équipés de kotatsu, des tables basses japonaises pourvues de chauffage électrique.
Ginzan Onsen : l’une des stations thermales les plus photogéniques du Japon
On a bien du mal à croire que Ginzan Onsen, l’une des stations thermales les plus photogéniques du Japon, nichée dans les montagnes de la préfecture de Yamagata, fut un jour un site minier. Ginzan Onsen, comme son nom l’indique, fut d’abord une grande mine d’argent aux alentours des années 1630. Ce n’est qu’à partir des années 1740 qu’on y développa des stations thermales. Aujourd’hui encore, la municipalité s’efforce de préserver ses magnifiques auberges et de faire vivre les traditions, faisant de Ginzan Onsen l’une des stations thermales les plus appréciées du Japon, si ce n’est du monde entier.
La rue principale suit le cours de la rivière Ginzan, le long de laquelle sont alignés les ryokan traditionnels, qui illuminent la rue de leur lumière chaleureuse à la tombée du jour. La majorité des visiteurs sont alors de sortie pour une promenade en yukata, ce qui rajoute encore un peu de magie à l’atmosphère de la station thermale. Au bout de la courte rue se trouve une cascade haute de 22 mètres, particulièrement belle durant l’automne, quand le feuillage des arbres se pare de couleurs flamboyantes.
Le temple caché de Yamadera
Fondé en 860, le temple Yamadera (山寺), qui s’inscrit dans le courant bouddhiste Tendai, est une autre des destinations de la préfecture de Yamagata qui fut visitée par Basho. Ce grand poète composa alors un haïku dédié à la tranquillité du site. J’avais déjà eu l’occasion de visiter le temple principal de Yamadera lors d’un précédent voyage, mais j’ai cette fois pu découvrir l’intrigant « Yamadera caché », considéré comme le site originel du temple.
Si les visiteurs du temple principal peuvent découvrir des bâtiments de taille modeste mais non moins remarquables, comme le Kaizando, le pavillon dédié au fondateur du temple, ce Yamadera caché possède une atmosphère très différente. Ici, on peut découvrir d’immenses formations rocheuses au sein desquelles une porte-torii a été érigée. Pour s’y rendre, il faut suivre un chemin de randonnée d’une trentaine de minutes qui offre de superbes vues sur les forêts alentour.
Miyagi : goûtez à un whisky de renommée mondiale et séjournez dans un village onsen vieux de 600 ans
Cœur vibrant du Tohoku, la préfecture de Miyagi, abrite la ville dynamique de Sendai (仙台市), très facile d’accès, à seulement 1h30 de Tokyo en Shinkansen. Servant de pôle pour desservir le reste du Tohoku, la préfecture abrite également nombre de ryokan typiques, avec leurs sources chaudes, ainsi que l’un des plus beaux cadeaux que le Japon fit au reste du monde : la distillerie Nikka Whisky.
Découvrez les secrets du célèbre Nikka Whisky
Le site de production du Nikka Whisky, fondé à Miyagikyo en 1934, est étonnamment accueillant et pittoresque pour une usine. Au cœur des montagnes et des forêts, l’atmosphère qui se dégage du lieu nous rend heureux d’avoir fait le déplacement avant même d’avoir savouré la moindre goutte de whisky. Le calme qui règne ici n’est pas le fruit du hasard, l’aménagement du site suit scrupuleusement les trois règles créées posées par son fondateur Masataka Taketsuru : pas de poteaux électriques, pas d’abattage d’arbre – la nature est essentielle à l’élaboration d’un bon whisky – et des bâtiments de briques.
Les visiteurs peuvent explorer l’enceinte de l’usine en compagnie d’un employé, et les explications sont données de telle sorte que même un novice en whisky puisse y trouver un intérêt et en apprendre beaucoup sur le processus de brassage et de distillation. L’usine propose également différentes dégustations de whisky, gratuites et payantes, ainsi qu’un atelier de mixologie pendant lequel chacun peut élaborer (et déguster) son propre cocktail sous l’œil d’un spécialiste.
Yunushi Ichijo : un ryokan de l’époque d’Edo
À Yunushi Ichijo, un ancien ryokan parfaitement entretenu, les chambres sont spacieuses et confortables, et les eaux thermales des onsen véritablement relaxantes. Mais c’est le dîner qui s’avère le plus remarquable.
Tout commence lorsque vous quittez votre chambre pour vous rendre dans votre salle à manger privative. Une déambulation des plus agréables au cœur de ce magnifique ryokan, l’un des établissements les plus anciens de la ville thermale de Kamasaki, dont l’histoire remonte à près de 600 ans en arrière. L’enchaînement de couloirs étroits et tamisés où s’alignent des portes coulissantes shoji donne presque l’impression de se frayer un chemin dans un labyrinthe. Quand on arrive enfin à destination, notre petite aventure est récompensée par l’un des dîners les plus remarquables que j’ai jamais eu l’occasion de déguster au Japon. J’ai passé un moment à admirer la table, dressée avec un raffinement remarquable, avant d’entamer un dîner kaiseki aux influences multiples, japonaises et occidentales, qui justifiait amplement les 3 étoiles + décrochées par le chef au Guide Michelin de Miyagi.
Fukushima : des couleurs et des sourires
La dernière destination de notre voyage fut la préfecture de Fukushima, la plus proche de Tokyo, accessible en à peine 1h30 de Shinkansen. On y trouve des temples, des sites historiques et une nature volcanique remarquable, mais avant tout un accueil chaleureux des habitants.
S’initier à la méditation zen au temple Ryusenji
Notre visite de Fukushima commence par une initiation individuelle à la méditation zazen avec le moine en tête de l’un des plus anciens temples de la préfecture, le Ryusenji, fondé en 1460 dans la ville de Nihonmatsu (二本松市).
Ce temple fait partie de l’école bouddhiste Soto, et sa succession reste familiale. Le jeune moine nous a vite rassurés sur la pratique du jour, en nous expliquant que se sentir à l’aise était primordial afin que l’esprit puisse s’effacer – bien plus important, en fait, que de suivre méticuleusement telle ou telle règle. Malgré ma nature angoissée et mes connaissances limitées sur la méditation, il ne m’a fallu que quelques minutes pour parvenir à lâcher prise jusqu’à ce que le gong me ramène doucement à la réalité à la fin de la session.
Goshikunuma : une randonnée pittoresque et un festin de spécialités italiennes
Notre activité suivante était un peu plus sportive que la méditation zazen, mais pas moins relaxante. Nous sommes cette fois partis faire une randonnée autour des étangs de Goshikinuma, situés dans le parc national de Bandai-Asahi. Une marche tranquille qui nous a permis d’admirer des paysages d’une beauté à couper le souffle.
La randonnée nous a pris environ une heure aller-retour, en comptant de nombreux arrêts près des lacs formés par l’activité volcanique. L’étang Aonuma, d’une belle teinte turquoise métallique, est souvent considéré comme le plus beau de cette destination. Le mot japonais goshiki-numa (五色沼) veut justement dire « cinq étangs colorés », et « goshiki » est également employé pour décrire une beauté colorée et mystérieuse, ce qui correspond parfaitement à ce qui attend les visiteurs qui s’aventureront ici.
Après avoir profité du grand air et des couleurs de la nature, nous avons repris des forces au restaurant Il Regalo, situé immédiatement à l’entrée du chemin de randonnée. Proposant des menus abordables (entre 1700 et 2700 yens), ce restaurant italien offre un grand choix de pâtes, de pizzas et de plats de viande, servis dans une atmosphère digne d’une authentique trattoria.
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Poupées de papier mâché et spectacle de danse au Takashiba Dekoyashiki Craft Village
Je ne pouvais espérer faire de plus beaux adieux à la préfecture de Fukushima et au Tohoku qu’en concluant mon voyage par cette visite au Takashiba Dekoyashiki Craft Village, près de la ville de Koriyama (郡山市).
L’artisanat au centre de ce village est celui de la fabrication de poupées de papier mâché, que les habitants auraient appris durant l’époque d’Edo au contact de voyageurs venus de Kyoto. Le secteur était alors assez pauvre et vivait principalement de la culture du riz récolté durant l’été. Apprendre ces techniques a donc permis aux habitants de se créer une nouvelle source de revenus pour les mois froids de l’hiver.
Nous avons visité une boutique tenue par un couple sympathique, qui nous a appris à fabriquer nos propres poupées de papier mâché, avant que le propriétaire ne nous fasse l’honneur de danser pour nous, portant un masque qu’il avait lui-même fabriqué.
Le couple nous a accompagnés durant chaque étape de la création, en commençant par le choix des motifs et des couleurs. Grâce à leur enthousiasme, à l’atmosphère chaleureuse de leur boutique-atelier, et à l’aspect méditatif de cette activité minutieuse, la visite du Takashiba Dekoyashiki offrit une merveilleuse conclusion à ce voyage dans le Tohoku.
Comment se rendre dans le Tohoku
Le Tohoku est très bien desservi par le réseau ferroviaire des lignes JR East, et notamment le Shinkansen qui monte jusqu’à Aomori. Les voyageurs désirant découvrir la région du Tohoku et qui n’auraient pas l’utilité d’un JR Pass national pourront se procurer un JR East Pass. Pour se rendre dans les territoires plus ruraux présentés dans cet article, la location d’une voiture pourra s’avérer utile, offrant plus de souplesse que le réseau de transport public – qui reste tout à fait envisageable dans la plupart des cas.
Le Tohoku est un territoire qui regorge de merveilles. Malgré mes cinq voyages dans la région, j’ai l’impression de n’avoir fait qu’effleurer la surface de ses nombreuses richesses, et j’ai hâte d’y retourner pour en découvrir davantage. La région combine le meilleur de deux univers : le Japon traditionnel qui accueille les voyageurs dans de somptueux hébergements, et le Japon plus contemporain, que façonnent au quotidien les jeunes habitants qui font entrer les traditions séculaires du Tohoku dans une nouvelle ère.
Article écrit en partenariat avec la Tohoku Tourism Promotion Organization
Photo de couverture mise à disposition par la Préfecture de Yamagata
Traduit de l’anglais par Julien Giry