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Au Japon, le restaurant ne compte pas pour du beurre. Aller au restaurant occupe une place centrale dans le quotidien des japonais : seul, entre collègues, en famille ou entre amis, on s’y rend volontiers pour la pause déjeuner, et le soir les nomikai s’y poursuivent jusqu’à la fermeture. Les restaurants sont généralement plutôt bon marché, surtout à l’heure du déjeuner, et ont la particularité d’être souvent spécialisés dans un type de cuisine. C’est parti pour une tournée des restos japonais !

Le restaurant au cœur du quotidien au Japon

C’est un fait, dans une société où l’espace intérieur revêt une dimension très intime, on reçoit rarement chez soi. Les raisons en sont aussi pratiques, car les logements en ville sont souvent exigus. On a donc tendance à se retrouver dans un espace neutre, et dans une culture où la gastronomie occupe une place de choix, le restaurant s’impose comme l’endroit idéal pour partager des moments de convivialité.

Si on mange le plus souvent à table ou au comptoir, le service peut aussi se faire sur tatamis, et parfois même dans de petits salons privatifs.

Dans les grandes villes, levez le nez, car les restaurants peuvent aussi se trouver en hauteur, il vous faudra monter quelques étages pour y accéder. Certains buildings sont même dévolus aux restaurants ! Dans les innombrables centres commerciaux du Japon, un étage est souvent consacré aux restaurants, qui se rassemblent le long de galeries, ou autour de food courts dans lesquels on peut s’installer à plusieurs autour d’une table sans pour autant commander dans le même restaurant.

En dehors des grandes sociétés, les restaurants d’entreprise se font rares. Alors, pour la pause déjeuner, le restaurant fait office de cantine. Et après la journée de travail, il est de bon ton de participer à un nomikai (飲み会) avec ses collègues, par exemple dans un izakaya. Ces soirées au restaurant sont censées renforcer la cohésion du groupe de travail.

Les restaurants de spécialités japonaises

Les restaurants au Japon ont la particularité d’être souvent spécialisés dans un type de cuisine ou de plat : ramen, udon, tonkatsu, tempuras, sushis, currys… Les setto (セット, de l’anglais « set »), sont des menus complets, le type de « set » le plus traditionnel est le teishoku, qui comprend plusieurs plats : du riz, une soupe miso, et trois plats, comprenant généralement un poisson ou une viande, des légumes, et des tsukemono (pickles).

menu teishoku au Japon : poisson, riz, soupe miso et accompagnements
Menu teishoku dans un restaurant à Enoshima. Photogrpahie : Todd Fong

Parmi les restaurants les plus typiques, l’izakaya (居酒屋) est au Japon ce que le bistrot est à la France, le pub à la Grande-Bretagne, le bar à tapas à l’Espagne : une institution. On y sert des plats traditionnels souvent présentés en petites portions ou à partager, mais on y vient tout autant pour boire des boissons alcoolisées. On retrouve d’ailleurs dans le kanji 酒 (alcool) dans le nom même des izakaya. Tout cela se fait dans une atmosphère décontractée et conviviale, pour des soirées qui peuvent se prolonger jusqu’à tard dans la nuit.

cuisinier japonais entrain de préparer un plat de sashimis
Cuisine sur le comptoir dans un izakaya

Tout aussi typiques sont les ramenya (らーめん屋), qui servent les fameux ramen, des nouilles dans un bouillon à base de poisson ou de viande, les udonya (うどんや), restaurants de nouilles épaisses à base de blé tendre, ainsi que les sushiya (寿司屋), restaurants de sushis. Dans ces derniers, les poissons sont souvent découpés au comptoir, devant les clients, et les sushis sont présentés en assortiments sur un plateau.

Repas sushis à Saiki
Dîner au Kamehachi, un restaurant de sushi à Saiki, Oita. Photographie : Aimée Moribayashi

Les gourmets se rendront volontiers dans des restaurants de kaiseki ryori (会席料理), cuisine kaiseki, incarnation de l’art de l’assiette à la japonaise. On y sert des repas gastronomiques composés d’une dizaine de plats qui se succèdent de façon codifiée. Pensés pour offrir un parfait équilibre de saveurs et de textures, les plats se dégustent autant qu’ils s’admirent, formes et couleurs harmonieusement arrangés selon une esthétique typiquement japonaise. Héritée de la tradition bouddhiste, la cuisine kaiseki est préparée à base de produits frais et de saison. Le service se fait dans un décor tout aussi raffiné et harmonieux.

repas gestronomique japonais kaiseki ryori au Japon
Repas kaiseki au ryokan Shiotomi-sou à Hibiki, Fukui. Photographie : Mika Senda

Du côté des grillades, vous pourrez vous tourner vers les restaurants de yakiniku (焼き肉, « viande grillée »). La viande peut y être cuite par les clients eux-mêmes sur un petit barbecue disposé au centre de la table et alimenté au charbon de bois. Le restaurants de teppanyaki (鉄板焼き), permettent de déguster de la viande grillée sur une plaque chauffante, souvent cuisinée devant le client par les mains experte d’un cuisinier qui n’hésite pas à faire jaillir quelques flammes pour surprendre les convives.

Les établissements de shabu-shabu (しゃぶしゃぶ) permettent également aux clients de faire cuire eux-mêmes leur viande à leur table. Dans cette variante de la fondue chinoise, on fait cuire des lamelles de bœuf et des légumes dans une marmite (nabe) emplie de bouillon parfumé, avant de les tremper dans un assortiment de sauces.

Japonais dans un restaurant de shabu shabu
Dans ce restaurant au pied du mont Daisen le shabu-shabu est cuit dans du lait. Photographie : Todd Fong

Pour ce qui est des fritures, les restaurants de tonkatsu (豚カツ) servent du porc pané, tandis que d’autres établissements sont spécialisés dans les tempuras (天ぷら), beignets en tout genre qui peuvent être à base de légumes, de poissons, de fruits de mer ou de viande. Vous pourrez aussi vous tourner vers des restaurants de gyozas (餃子), de délicieux raviolis frits typiquement japonais.

Plat de gyoza, ou raviolis japonais
La ville de Hamamatsu est considérée comme la « capitale des gyoza » : on y trouve plus de 300 restaurants spécialisés. Photographie : Todd Fong

Autre spécialité extrêmement populaire au Japon : le curry japonais. Servie avec du riz, la sauce curry est accompagnée de légumes, de viande ou de poisson. Il existe même des plats de udon au curry.

curry japonais dans un restaurant à Tokyo
Curry japonais du restaurant Kare Wa Nomimono à Tokyo. Photographie : Todd Fong

Dans les kaiten-zushi (回転寿司, « sushi tournant »), différentes variétés de sushis sont présentées sur un tapis roulant qui fait le tour de la salle et défile de table en table. Le client se sert sur le tapis. Il est possible de commander d’autres spécialités, soit au comptoir, soit sur une tablette tactile. Le prix du plat est indiqué par la couleur de l’assiette, et l’addition finale est calculée en fonction des assiettes empilées sur la table.

restaurant de sushis tournant au Japon
Dans un restaurant de kaiten-zushi

Dans un autre style, moins traditionnel et plus décontracté, les famiresu (ファミレス, family restaurants) sont « family friendly ». Ils servent des spécialités japonaises et internationales, notamment américaines (burgers), italiennes (pâtes) et tex-mex (nachos). Des coloriages ou de petits jouets peuvent être distribués aux enfants. Certains plats comme la soupe miso, la soupe de maïs, les salades ou le riz peuvent être servies sous forme de buffet. Le « drink bar » (dorinkubā, ドリンクバー) est une option populaire qui permet de se servir à volonté d’un certain nombre de boissons.

enseigne de restaurant familial au Japon
Beaucoup de famiresu appartiennent à des chaînes comme Denny’s ou Gusto.

Yatai et street food au Japon

Incontournables de la street food au Japon, les yatai (屋台) sont des stands de nourriture ambulants souvent installés pour la soirée. Ils accompagnent traditionnellement les matsuri (festivals) et autres événements, mais se sédentarisent ici et là, en particulier à Fukuoka, où l’on y sert des Hakata ramen, et de nombreuses autres spécialités culinaires locales.

À Fukuoka, les yatai sont une fierté locale. Photographie : Clémentine Cintré

Certaines échoppes sont devenues des institutions locales permanentes. Elles mijotent et vendent des plats populaires et bon marché qui varient selon la région et la saison.

Les restaurants à thème, une expérience originale et typiquement japonaise

Les restaurants à thème servent leurs repas dans des décors insolites, surprenants et parfois loufoques. On peut par exemple citer le célèbre Pokémon Café ou le regretté Kawaii Monster Café, et les nombreux restaurants et cafés permanents ou temporaires qui recréent des atmosphères décalées, effrayantes ou oniriques, issues de mangas, de séries grand public ou de franchises. Certains restaurants arborent des thèmes moins japonais, comme les Alice’s Fantasy Restaurant de Tokyo et Osaka, sur le thème d’Alice au pays des merveilles.

On ne trouve pour autant pas ce genre de restaurant à tous les coins de rues, certaines de ces enseignes ciblent tout particulièrement les touristes étrangers en quête de cette « excentricité japonaise » en réalité pas si courante que ça.

Dans un autre genre, les restaurants de pêche font du restaurant un divertissement. Le convive retrouve dans l’assiette le poisson qu’il vient lui-même de pêcher dans un bassin, à la canne à pêche ou au filet.

un restaurant japonais où on pêche son repas
Les tables peuvent être disposées dans un décor de bateau entouré de bassins de pêche, comme chez la chaîne Zauo. Le principe : ne pas relâcher les prises ; ce qui est pêché est cuisiné.

Spécificités et curiosités des restaurants au Japon

La curiosité commence dès la devanture. Les établissements exposent en vitrine des sampuru (サンプル), des répliques factices de plats en résine, en cire, silicone ou plastique.

Vitrine de sampuru
Souvent plus vrais que nature, les sampuru sont bien pratiques pour faire son choix quand on ne lit pas le japonais !

Arrivé à table, on commence par se rafraîchir les mains avec l’oshibori (おしぼり), une petite serviette, parfois fraîche en été et chaude en hiver.

La curiosité peut aussi venir de la manière de commander. Dans certains restaurants rapides, certaines cafétérias de sites touristiques ou dans nombre de restaurants de ramen ou de udon, la commande se fait via un distributeur qui vous permettra d’obtenir un ticket à échanger contre votre plat. Il est parfois possible de régler avec une carte à puce comme la carte Suica de la Japan Railway, ou en paiement sans contact avec un smartphone.

Dans certains restaurants, comme les kaiten-zushis ou les family restaurants, la commande peut aussi se faire sur une tablette à écran tactile posée sur la table.

Dans un izakaya, comme dans d’autres types de restaurants (par exemple les restaurants italiens), il est courant de commander en commun plusieurs plats à partager. Ils sont servis au centre de la table. Chaque convive pioche dans plusieurs assiettes et se sert dans une petite assiette appelée torizara (取り皿).

Autre « spécificité » de la restauration japonaise, les restaurants tabehodai (食べ放題, « nourriture à volonté »). On trouve bien sûr des restaurants à volonté dans nos pays occidentaux, mais au Japon cette formule est une véritable institution et son fonctionnement diffère quelque peu de ce à quoi on peut être habitué. Car ces formules à volonté sont souvent limitées dans le temps, 1h30, 2h, ou plus : il est possible de commander tout ce que l’on veut, mais dans un temps imparti. Des sushis aux pizzas, en passant par les restaurants de yakinuku ou de shabu-shabu, il est possible de trouver des formules tabehodai pour de nombreuses spécialités, japonaises comme occidentales.

Quelques expressions pour commander au restaurant en japonais

Les menus sont souvent assortis de photos, mais la commande n’est pas toujours évidente quand on ne lit pas le japonais. Dans les chaînes de restaurants et les établissements bon marché, on appelle le serveur avec un bouton. Sinon, on lance un « すみませ, sumimasen« , « excusez-moi », pour l’appeler.

  • Il est possible de désigner son plat sur la carte, en disant « kore kudasai » (これ下さい), « je voudrais ceci ».
  • Pour ajouter un plat : « sore to, kore mo kudasai » (それと、これもください), « je voudrais aussi cela ».
  • Pour commander deux plats, on dira : « XXX wo futatsu kudasai » (XXXを2つください).
  • Le très passe-partout « onegai shimasu » (お願いします) peut clore le passage de commande.
  • On termine par « arigatō gozaimasu (ありがとうございます)« , « merci beaucoup ».
  • L’addition se demande « o-kaikei wo onegai shimasu » (お会計お願いします).
kanjis sur le mur d'un restaurant au Japon
Carte murale rédigée en japonais dans un restaurant de tempura.

Au Japon, le restaurant s’impose comme un véritable lieu de socialisation au quotidien. S’il y en a pour tous les goûts, les établissements sont souvent spécialisés dans un type de plat qu’ils déclinent de plusieurs manières, avec divers accompagnements et assaisonnements. Au-delà même des découvertes gustatives, le restaurant au Japon surprend par quelques usages et pratiques spécifiques. La sortie au restaurant au Japon relève d’une expérience singulière, indissociable de la découverte du pays.

Marie Borgers

Marie Borgers

Après une préparation intense, la lecture de dizaines de livres et des centaines d'heures d'étude du japonais, j'ai tout quitté pour venir m'installer au Japon, à Nagoya. En tant qu'éditrice et rédactrice, j'aime partager les émotions suscitées par l’évasion, et transmettre la connaissance d'autres cultures, berceau de la tolérance.

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